2004/09/25

La barbarie banalisée en Irak (lorsqu'elle est appliquée contre les Américains)

"Alors que la presse s'était déchaînée des jours entiers contre les Américains, pour les humiliations qu'ils avaient fait subir à des détenus dans la prison d'Abou Ghraïb, ses indignations paraissent comparativement bien modérées devant l'inhumanité de ceux qui tranchent des têtes" en Irak, écrit Ivan Roufol, qui évoque aussi le refus des agences de presse et des médias français, de diffuser un communiqué sur ce sujet :

Chirac, «Voix de la France»

Jacques Chirac, lundi devant l'ONU à côté du président brésilien Lula da Silva, du Chilien Ricardo Lagos et de l'Espagnol José Luiz Zapatero, pour réclamer l'instauration d'un impôt mondial afin de lutter contre la pauvreté dans le monde. Plus que jamais, le président de la République entend être l'antithèse de George Bush, qui justifiait le lendemain, devant les mêmes Nations unies, son intervention en Irak. Chirac se veut d'autant plus pacifiste, tiers-mondiste, multilatéraliste, onusien et de gauche que Bush apparaît combatif, libéral et de droite.

Les Français découvrent chaque fois davantage leur président militant. Il ne ressemble plus en rien au Chirac de 1988 qui donna l'ordre de prendre d'assaut la grotte d'Ouvéa (vingt et un morts), ni à celui de 1995 qui relança les essais nucléaires dans le Pacifique, et encore moins à celui de 1999 qui approuva le bombardement de la Serbie sans l'accord de l'ONU. Aujourd'hui, quand le chef de l'État déclare des guerres, c'est contre le cancer, l'insécurité routière et les conditions subies par les handicapés. Il est la compassion même. Un profil de prix Nobel de la Paix.

Cette politique «soft», qui déborde de bons sentiments et a reçu cette semaine l'aval du mouvement altermondialiste Attac, cherche le soutien de l'opinion internationale, qui fait tant défaut aux États-Unis. Chirac ne prend guère le risque de la décevoir, en prônant des taxes sur les armements, sur les transactions financières ou sur les bénéfices des multinationales pour collecter les dollars au profit des pays les plus pauvres. Dans la gestion de la mondialisation, la «Voix de la France» s'impose grâce à lui comme une référence.

Reste cependant, derrière cette popularité flatteuse, un doute sur l'efficacité de cette posture qui évite l'action et se réfugie dans les mots. «Jusqu'à présent, force est de constater que de telles idées n'ont jamais dépassé le stade de voeux pieux», faisait savoir, mardi, la Commission européenne, en commentant le projet d'une fiscalité mondiale. Surtout, Jacques Chirac, qui défend les subventions agricoles nationales, est de ceux qui empêchent les pays les plus pauvres d'exporter leurs productions et donc de s'enrichir. Autant d'ombres sur la perfection du message présidentiel. …

La barbarie banalisée en Irak

Le plus choquant, dans ces égorgements d'otages en Irak, reste la pondération de la majorité des médias français qui parlent d'«exécutions» comme si une justice était rendue. Aveuglés par leur antiaméricanisme, ils se montrent incapables de dénoncer la barbarie islamiste qui s'étale aux yeux du monde et donne envie de vomir. Alors que la presse s'était déchaînée des jours entiers contre les Américains, pour les humiliations qu'ils avaient fait subir à des détenus dans la prison d'Abou Ghraïb, ses indignations paraissent comparativement bien modérées devant l'inhumanité de ceux qui tranchent des têtes aux cris d'«Allah Akbar» («Dieu est le plus grand»), en récitant des versets du Coran.

Avant Eugene Armstrong et Jack Hensley, décapités cette semaine par le boucher al-Zarkaoui, près d'une vingtaine d'otages ont été assassinés au couteau et filmés dans leur agonie, jusqu'à ce que le bourreau pose la tête sur le dos du supplicié : une violence insupportable mais pourtant banalisée, comme le déplore avec raison le Syndicat de la presse communication-CGC, qui dénonce également une «instrumentalisation de l'information» et appelle à «un grand débat» sur ce problème. Mais ce syndicat ne peut accéder aux agences de presse et aux médias français, qui refusent de diffuser son communiqué.

A constater aussi, évidemment, le silence pesant de ces «plus hautes autorités de l'islam» saluées hier par la France pour s'être indignées que l'on puisse prendre en otages deux journalistes français.

2004/09/20

"Venant d'un pays qui a longtemps souffert du totalitarisme, je ne peux oublier cette indifférence d'une partie de l'opinion internationale"

Cette interview avec Bronislaw Geremek a été faite alors que la figure historique de la résistance polonaise au communisme briguait la présidence du Parlement européen.
Arnaud Leparmentier : Vous avez été attaqué pour votre soutien à la guere en Irak. Comment réagissez-vous?

Cette attaque me peine beaucoup. Dans la guerre d'Irak, il y avait le refus d'accepter une des dictatures les plus sanglantes de notre siècle. Je ne suis pas malheureux de penser qu'il y aura maintenant un dictateur de moins.

…On ne peut pas voir dans mon attitude un engagement pour une politique américaine. Il y avait un engagement pour les valeurs morales qui devraient être présentes dans la politique internationale. Venant d'un pays qui a longtemps souffert du totalitarisme, je ne peux oublier cette indifférence d'une partie de l'opinion internationale. On devrait établir une sensibilité éthique à l'égard des problèmes internationaux. Ce n'est ensuite qu'il faut poser la question politque, tout à fait justifiée, de l'efficacité de l'action.

Lire comment le quotidien dénigre
le courage et l'attitude de fermeté
en taxant la société polonaise
d'opinion publique apathique

2004/09/15

Principaux médias US accusés d'être biaisés contre Bush

Comme le reconnait Patrick Jarreau,
En général, ce sont … les républicains qui accusent les grands journaux et les principales chaînes de télévision — à l'exception de Fox News — d'être "biaisés".
Rappelez-vous, un article online avait rapporté que Fox News ne figurait même pas parmi les 12 sites des médias d'information les plus visités.

Alors, la prochaine fois que vous entendrez quelqu'un fustiger Fox News comme étant représentatif des médias (et des citoyens!) américains, ou que vous entendrez quelqu'un se lamenter que la presse est au pas de Bush, vous secouerez la tête, en leur rappelant les faits énoncés dans ce post, n'est-ce pas?…

Update Les médias américains montrent encore une fois leur aveuglement, leur statut de zombies, et leur inféodation à Bush

2004/09/14

Le mythe du déclin américain

Le Figaro publie un un entretien croisé entre l'auteur de L'Odyssée américaine et celui de Made in USA. Entre autres choses, Alexandre Adler explique les deux raisons pour lesquelles George W Bush n'a pas menti sur les ADM, tandis que Guy Sorman regrette "que l'amitié franco-américaine n'a jamais réellement existé. On relève déjà la condescendance française envers les Etats-Unis dans les lettres que Talleyrand". Guy Sorman ajoute que "J'ai bien peur que les propos nuancés que nous tenons s'avèrent incompréhensibles pour les Français, persuadés que tout ce qui est américain s'explique par le cynisme de la World Company". (Propos recueillis par Baudouin Bollaert, Marie-Laure Germon, et Laure Leibovitz)

LE FIGARO : Les élections américaines auront lieu en novembre prochain. Votre pronostic ?

Alexandre ADLER : Si Bush incarne, incontestablement, des valeurs conservatrices, il présente une certaine sensibilité civique qui le rend moins abrupt qu'un Dick Cheney ou qu'un John Ashcroft. En même temps, n'oublions pas qu'une aile gauche modérée demeure au sein du parti républicain. Cette dernière tend vers l'avènement d'un conservatisme dont l'humanité s'exprime sur des sujets sociétaux aussi divers que le statut de l'homosexualité ou l'importance de l'éducation. Le président actuel rejoint cette minorité de centre droit sur un point : le racisme. Bush est profondément antiraciste : il a nommé des Noirs à des postes clés, comme on ne l'avait jamais vu dans de précédents gouvernements démocrates, et n'a vraisemblablement aucun préjugé envers les Hispaniques. Il est, comme disent les Américains, color blind

Guy SORMAN : Revenons un instant sur l'antiracisme de Bush. Le Parti républicain n'est pas un parti de droite xénophobe au sens où l'on pourrait l'imaginer en Europe occidentale. George Bush – de même que Ronald Reagan en son temps – se montre très favorable à l'immigration ; elle constitue aux yeux de beaucoup de conservateurs la nature même des Etats-Unis. L'immigration hispanique et asiatique est particulièrement encouragée, en raison de la sympathie naturelle que ces populations entretiennent avec les valeurs traditionalistes, la religion, la famille, l'éthique du travail et la volonté farouche de s'intégrer au rêve américain. Même si l'on ne sait pas vraiment en faveur de quel candidat les Hispano-Américains se prononceront, leur comportement personnel et religieux s'avère profondément conservateur.

Si les Américains critiquent de plus en plus la gestion de l'après-guerre en Irak, la majorité d'entre eux ne conteste pas le bien-fondé de l'intervention...
Guy SORMAN : C'est exact. Si les Français s'imaginent que l'élection de Kerry modifiera la diplomatie américaine, prévenons-les tout de suite que cela ne sera pas le cas. La politique étrangère vient en effet de très loin, et remonte jusqu'à Jefferson, dès 1800. La vocation des Etats-Unis est, pour la plupart des Américains, de mondialiser la démocratie, parce qu'ils jugent cette entreprise juste, bonne, et qu'ils pensent que c'est la seule manière d'aboutir à la paix dans le monde. Ils considèrent qu'en dehors de l'éradication fondamentale de la tyrannie, aucune paix dans le monde n'est possible. Les Américains ont fait d'ailleurs par le passé la preuve de leur capacité à instaurer la démocratie, au Japon, en Allemagne, en Corée, à Taïwan, au Nicaragua. Une démocratie qui, selon eux, doit également se développer en Chine et au Proche-Orient. La sensibilité de Kerry n'est pas contraire à cette vision du monde où l'Europe ne tient pas une place centrale. …
Comment se fait-il que le mensonge de Bush sur les armes de destruction massive ait si peu influé sur l'opinion américaine ?
Alexandre ADLER : …Bush n'a pas menti pour deux raisons : tout d'abord il ne fait aucun doute qu'il croyait sincèrement à la présence effective d'armes de destruction massive en Irak, jusqu'à ce que cette certitude ne soit partiellement démentie. S'il s'est trompé, il n'a donc pas menti ; une distinction que les Américains ont parfaitement comprise. Par ailleurs, Saddam Hussein avait déjà par le passé usé d'armes de destruction massive, en l'occurrence de gaz de combat contre les Kurdes ou les Iraniens. Il a mené des expériences bactériologiques, et planifiait un programme nucléaire important heureusement démantelé. Par conséquent, rien n'autorisait à penser qu'il ne persévérerait point dans son entreprise belliqueuse.
Et le lien supposé entre Saddam Hussein et Ben Laden ?
Alexandre ADLER : Les Américains ont eu du mal à distinguer la xénophobie agressive du parti Baas de l'islamisme radical d'Oussama Ben Laden, manquement contestable sur le plan de l'analyse géopolitique mais justifiable d'un point de vue philosophique. Or, la volonté d'utiliser des armes de destruction massive par Al-Qaïda est incontestable, tout comme l'est l'existence d'arsenaux de ce genre au Moyen-Orient, notamment en Irak autrefois. les Américains ont donc voulu éviter la mise en contact et la collusion de ces deux idéologies meurtrières, probablement un peu avant que les problèmes ne se posent réellement. Et je ne peux pas leur donner totalement tort. On peut en revanche reprocher aux Américains l'impréparation de l'après-victoire technologique à Bagdad lorsqu'ils ont touché le sol.
La volonté américaine d'exporter la démocratie ne sert-elle pas à masquer une tendance inavouée à l'expansionnisme ?
Guy SORMAN : Cette distinction n'existe que dans nos esprits. Pour nous autres, Français ou Européens, les Américains sont nécessairement suspects d'être autre chose que ce qu'ils prétendent être. … Nous sommes bien les seuls à pouvoir nous offusquer que l'exportation de marchandises «made in USA» prolonge l'exportation de leur modèle démocratique.

…J'ai bien peur que les propos nuancés que nous tenons s'avèrent incompréhensibles pour les Français, persuadés que tout ce qui est américain s'explique par le cynisme de la World Company !
Comment, justement, expliquez-vous la vigueur de l'antiaméricanisme français ?
Guy SORMAN : L'antiaméricanisme est une idéologie aussi ancienne que les Etats-Unis eux-mêmes. C'est un discours autonome qui entretient un rapport assez lointain avec la réalité américaine. Sachons, tout d'abord, que l'amitié franco-américaine n'a jamais réellement existé. On relève déjà la condescendance française envers les Etats-Unis dans les lettres que Talleyrand, alors en exil à Philadelphie, envoyait en 1794 à Paris pour fustiger ce nouveau continent d'un mot assassin : «Une nation qui a trente religions et un seul plat n'est pas un peuple civilisé.» L'évêque ne pouvait supporter cette nation protestante débordant de sectes enthousiastes, de fous de dieu, et dépourvue – ô péché suprême ! – de la moindre once de raffinement. L'aristocratie française, à l'exception de Tocqueville, a toujours méprisé la démocratie américaine, qualifiée de populiste. Nos intellectuels et nos élites politiques restent tout aussi réticents envers une nation qui n'octroie aucun privilège aux élites éclairées.

Alexandre ADLER : …l'absence totale de projet impérial à long terme de l'Amérique devrait jouer en sa faveur aux yeux du Vieux Continent. S'il existe une volonté d'expansion économique indéniable de sa part, il s'agit à coup sûr d'une stratégie aussi féconde par la concurrence qu'elle induit que non violente par les méthodes qu'elle implique. On peut dire que l'Irak a été le tombeau d'un éventuel projet de domination ; l'Amérique n'a plus d'appétit pour attaquer le moindre État de la planète, ni la Syrie, ni la Corée du Nord ou l'Iran. La situation actuelle en Irak fait la preuve que l'Amérique ne peut – et surtout ne veut – diriger le monde, et ce précisément parce qu'elle incarne avant tout une république démocratique et très secondairement un empire. …

Guy SORMAN : Eclairons le présent à la lumière du passé et revenons aux principes des fondateurs : si selon Jefferson, l'Amérique est bien «L'Empire de la liberté», il ne fait aucunement référence à un impérialisme tel que l'Européen du XIXe siècle peut l'entendre. La conviction profonde que le monde trouvera la paix le jour où toutes les sociétés s'établiront sur les fondements d'une démocratie libérale est toujours en vigueur. La guerre ou même l'évangélisation ne sont que des moyens utilisés au service de ce projet.

Faites-vous allusion ici à l'expansionnisme religieux des Etats-unis ?
Guy SORMAN : On sait peu que la religion qui gagne le plus de terrain aujourd'hui dans le monde, ce n'est pas l'islam, mais ce que j'appelle «la nouvelle religion américaine». Celle-ci est plus imprégnée de l'Ancien Testament que du Nouveau. Si Dieu en est le centre, il se situe moins au-dessus des fidèles – comme dans le judaïsme ou le christianisme européen – qu'en eux-mêmes. Des fidèles qui préfèrent des résultats concrets ici-bas et maintenant, sans attendre l'au-delà. Les baptistes sont actifs partout, les pentecôtistes et mormons sont présents en Afrique, comme dans les anciens pays communistes et en Chine. En Amérique latine, les églises évangéliques se substituent aux catholiques...
L'idée d'un déclin des Etats-Unis tel qu'il a été pronostiqué par certains auteurs, comme Emmanuel Todd, vous paraît-elle fondée ?
Alexandre ADLER : Les exemples que donne Emmanuel Todd me semblent totalement farfelus, de même que son analyse de l'économie politique américaine. Il refuse par exemple de considérer l'information et le monde des médias comme une industrie, alors qu'elle constitue pourtant le nerf de la nouvelle révolution industrielle. Les Etats-Unis ne sont absolument pas sur le déclin, ils l'ont d'ailleurs remarquablement montré à plusieurs reprises au cours des années quatre-vingt-dix. L'Amérique vient au contraire de prendre la tête de la nouvelle révolution industrielle et l'Europe traîne bien loin derrière, notamment en matière de recherche. Le conservatisme-ruraliste-écologiste à la mode José Bové fait des ravages encore supérieurs. Cela dit, si l'Amérique demeure le pays le plus riche et le plus puissant, son degré d'interdépendance économique devrait croître dans les années à venir avec, notamment, une dépendance énergétique toujours plus forte.

Guy SORMAN : Précisons que, pour le moment, la part de la production américaine dans le monde reste immuable, malgré l'émergence de la Chine et du Japon. Les autres pays progressent, mais pas au détriment de l'Amérique. Tous s'enrichissent ensemble ! Surtout les Etats-Unis gardent la haute main sur l'innovation et la recherche avec 90% des brevets déposés dans le monde, ce qui leur donne trente ou quarante ans d'avance permanente. …

(Merci à Rémi)

2004/09/13

In Memoriam :
Jérôme Robert Lohez

Rien vu dans les médias français sur Jérôme Robert Lohez.

Qui est-il, d'abord?

Une victime des attentats du 11 septembre. Une victime d'origine française…

Une personne qui, à l'âge de 30 ans, s'est conduit avec un héroïsme hors du commun.

Une amie lui écrira, posthumement :

You had the chance to evacuate — you saw the south tower fall — you stayed behind. I truly believe you were there to comfort others and wait with them until help arrived. Jerome — you continue to amaze me in your selflessness.
Une autre personne, dit-elle, se souviendra toujours de lui :
I just wanted to let his family know that he was on my mind all day, and will be for the rest of my life. … Thank you so much Mr. Lohez and you will always be a Hero to me. God Bless.
Six Allemands sont morts ce jour-là, quatre d'entre eux des passagers des avions détournés, deux autres dans leurs bureaux du World Trade Center. Mais contrairement à l'Américain ci-dessus, les Allemands ne les porteront pas longtemps dans leurs mémoires, s'il faut s'en tenir à la presse allemande, car elle aussi a tu leurs noms…

Se souvenir de ces hommes et femmes, en effet, c'est se rappeler les pertes et la douleur des Américains. C'est se rappeler que ceux-ci aussi sont humains. C'est cesser de les discréditer et de les caricaturer… Voilà quelque chose qu'il faut à tout prix éviter dans l'Europe éternellement sage, tolérante, lucide, humaniste, visionnaire, et… solidaire.

Et donc, c'est ici qu'on écrira :

Rest In Peace, Jérôme Robert Lohez.

(Thank you, Paprika)

2004/09/11

Le 11 septembre 2001 :
"J'accuse certains Français"

Publiée dans Le Figaro quatre jours après les attentats du 11 septembre, la lettre d'une Française vivant à Washington décrivait les "Scènes d'horreur aux États-Unis. Visions d'enfer après le passage des kamikazes. Corps mutilés, brûlés vifs ou réduits en bouillie." Avant de demander "À qui la faute?" Sa réponse :
Probablement à des terroristes du Moyen-Orient. Mais avant tout à l'antiaméricanisme ambiant. J'accuse nos alliés européens — en particulier la France — d'entretenir cet antiaméricanisme depuis bien longtemps, et de donner ainsi davantage de liberté d'action à ceux qui ont pour but la destruction des États-Unis.
Paule Zapatka poursuit :
J'accuse certains Français de jalousie mesquine envers ce pays qui semble ne jamais donner assez, en termes de vies humaines ou d'aides de toutes sortes. ... J'accuse surtout les journalistes français de bâcler leur travail. De donner des États-Unis une idée complètement erronée des événements ou de jeter sur eux une lumière si crue que le reste du tableau est laissé dans l'ombre. Pas une semaine et guère un jour sans que la presse francaise, ou le journal parlé de 19 h ... ne se fasse les dents sur les États-Unis.

Tout est bon à discréditer ou à caricaturer. Et un de vos confrères n'avait guère trouvé les mots justes quand il déclarait à la télévision : "Les États-Unis ont été frappés là où ça leur fait le plus mal : dans leurs puissance économique et financière." Non, Messieurs. Ce qui fait le plus mal, c'est la perte de milliers de nos concitoyens dans une mort horrible, et c'est la restriction de la liberté de chacun qui résultera de cette attaque terroriste. L'Amérique toute-puissante est un mythe.


Leçons de démocratie pour les Baltes, les Polonais, et autres Est-Européens émotionnels…

Un certain nombre d'articles semble vouloir confirmer aux lecteurs du Monde que les nouveaux membres de l'Union européenne ne montrent pas la capacité de démocratie, d'amour des valeurs républicaines, de savoir-vivre, et de rationalité — que dis-je, de lucidité à la française — dont sont (c'est bien connu) naturellement dotés les Français.

Le papier sur les pays baltes passe encore, bien qu'on y a droit aux leçons sur les "critères démocratiques" que l'Union européenne entend donner à l'Estonie, la Lettonie, et la Lithuanie. De même, si Antoine Jacob évoque les "atrocités" de l'époque soviétique, il dilue leur portée avec des expressions relativisantes : les "crimes commis au nom de l'idéologie communiste" (souligné par moi), "un contexte historique complexe", "les Etats baltes ne peuvent se permettre une attitude ambigüe sur le sujet".

Les leçons continuent : "dans l'esprit de nombreux Baltes, le communisme était aussi nuisible, voire davantage, que le nazisme. Les atrocités commises au nom du premier ont été subies jusqu'à 1991, contribuant à faire oublier les horreurs, plus anciennes, émanant du second" (souligné par moi) . Mais ne vous en faites pas — les Français comme Jacob, qui ont une mémoire bien meilleure (et qui n'ont jamais souffert sous l'occupation de Moscou), sont là pour leur rappeler que leurs souffrances sous le communisme ne doivent pas être exagérées, enfin, car il ne faut pas oublier que les communistes avaient des bonnes intentions. Antoine Jacob semble s'étonner quelque peu du fait que "Polonais et Baltes réclament [la] condamnation solennelle au niveau européen" des crimes communistes, sans (apparemment) se rendre compte que c'est précisément avec une attitude de dilution (et d'étonnement) comme celle de certains Européens de l'Ouest (dont celle de Jacob) qui font que les Est-Européens la réclament avec fermeté, cette condamnation.

La fin d'un article est souvent réservée à un sujet d'une immense gravité, et Antoine Jacob ne manque pas à son devoir : "les Etats baltes doivent résorber les inégalités sociales, devenues nettement plus criantes à la faveur du passage à l'économie de marché", apprend-t'on. "La forte croissance économique des dernières années ne doit pas profiter qu'aux plus aisés. Sinon, la gangrène de la corruption risque de s'étendre." (Au moins, sous l'empire soviétique, cet état de faits n'existait pas.) Et le papier se termine par une autre leçon à l'égard du trio balte.

Dans un article sur leurs voisins polonais, dont le titre, si je ne me trompe, laisse entrevoir une pointe de mépris (Cette Pologne qui critique tous les grands), Christophe Châtelot écrit comme suit:

…en quête d'identité, [la Pologne] entend rattraper le temps perdu en ne cessant de rappeler d'où elle vient. …

…la sous-représentation française aux cérémonies du 60e anniversaire a été interprétée comme une nouvelle marque de ce dédain dans lequel Paris est suspecté de tenir Varsovie, allongeant ainsi la liste des reproches tenus, à tort ou à raison, à l'endroit de la France.

Personne ici n'a oublié la phrase indélicate du président Chirac conseillant en 2003 à la Pologne de se taire plutôt que de s'engager bruyamment aux côtés des Etats-Unis en Irak ; le soutien français aux Polonais lors les négociations d'adhésion à l'UE fut jugé trop tiède ; il y a aussi la conviction que ce sont les Français — indécrottables laïques — qui torpillèrent l'inscription des références à l'héritage chrétien dans la Constitution européenne...

Bref, la France est sans doute le pays avec lequel les relations sont le plus placées sous le signe de l'émotion. Pour reprendre les mots de Marek Ostrowski, la Pologne vivrait avec la France "un amour inachevé", source d'incompréhension. Quant à la France, premier investisseur étranger en Pologne, elle a le sentiment d'être le bouc émissaire idéal.

Un bouc émissaire soupçonné de vouloir établir un directorat avec l'Allemagne sur l'Union européenne. Tout est bon pour tenter de casser ce moteur. Comme de proposer, ainsi que l'a fait en juin le ministre polonais des affaires étrangères, Wlodzimierz Cimoszewicz, d'élargir le triangle de Weimar à la Grande-Bretagne. Ce qui viderait de son sens ce forum consultatif franco-germano-polonais établi dans les années 1990, notamment pour favoriser le rapprochement de l'Allemagne avec la Pologne sur l'exemple de la réconciliation franco-allemande.

Les Etats-Unis, alliés stratégiques que Varsovie regarde avec des yeux de Chimène, ne sont pas non plus épargnés par les critiques. …

La Pologne entend jouer dans la cour des grands un rôle justifié par son histoire, sa culture et sa position aux confins orientaux de l'UE. Le problème n'est pas celui de ses ambitions, mais de la façon trop émotive de le faire savoir.

Contrairement aux Français, donc, les Polonais (comme les Baltes) ne sont pas raisonnables ("Tout est bon pour tenter de casser ce moteur"). Il ne faut pas (trop) porter foi à leurs révendications, car — contrairement aux Français éternellement lucides — leurs relations sont placées "sous le signe de l'émotion". (Ce n'est certainement pas quelque chose dont souffrent les Francais — par exemple, à l'égard de l'Oncle Sam.) En d'autres mots, et en fin de compte, Jacques Chirac avait raison : les Européens de l'est feraient mieux de… se taire…

2004/08/21

Ce que Le Monde prend du New York Times (les Bushismes) et ce qu'il laisse de côté (un des plus grands scandales de corruption de l'Histoire)

La presse française se tient informée, évidemment, de ce qui se trame dans les journaux étrangers, afin de faire profiter à ses lecteurs des infos qui pourraient susciter leur intérêt. Ainsi, récemment, après avoir parcouru le New York Times, Corine Lesnes a écrit un article dans Le Monde sur les Bushismes du président américain.

Ce qui est étonnant, c'est que le journal indépendant n'a soufflé mot sur un article majeur (republié à la une de l'International Herald Tribune, journal publié à Neuilly-sur-Seine et distribué dans toutes les kiosques de journaux de l'Hexagone) mettant en doute la fiabilité et l'honnêteté (c'est le moins que l'on puisse dire) des membres du dénommé Parti de la Paix — c'est-à-dire exposant la réalité sur les relations qu'ils ont entretenu avec Saddam Hussein, qu'ils auraient enrichi, et la corruption majeure qui a régné au sein du programme onusien de pétrole contre nourriture en Irak…

Lire la suite (en anglais)…

2004/08/20

"Les Français ont toujours eu le don rare de dissimuler leurs intérêts personnels derrière de grandes idées"

Les Français, tous les leaders français, avaient fait comme si l'Europe n'était qu'une grande France, une sorte d'Empire napoléonien ressuscité, que nos élites pouvaient à la fois couvrir de nos chères préfectures et de nos idées politiques géniales
écrit Eric Zemmour dans Le Figaro (Solitude française...).
D'abord, il n'y en a eu que pour eux. Jacques Chirac qui ferraille des heures durant contre Tony Blair pour le choix du président de la Commission européenne. François Hollande qui adjure les socialistes européens de ne pas passer leurs accords habituels avec la droite au Parlement de Strasbourg. François Bayrou qui quitte les rangs du PPE, et tente de fonder avec d'autres transfuges italiens ou polonais un parti démocrate européen.

Quelques jours après ces élections européennes, les Français étaient partout. Adeptes de la guerre de mouvement, ils semblaient faire de la politique comme personne. Ils donnaient l'impression d'être les derniers en Europe à y croire. En tout cas, ils faisaient magnifiquement semblant. Les Français ont toujours eu le don rare de dissimuler leurs intérêts personnels derrière de grandes idées. Chirac se bat pour l'«Europe-puissance» ; Hollande rétablit «le clivage droite-gauche» ; Bayrou invente une véritable troisième voie entre libéralisme et socialisme.

C'est la campagne électorale qui continuait. Pendant quinze jours (seulement), dans l'indifférence générale, DSK avait réinventé l'Empire romain, Bayrou avait trouvé une nouvelle définition au mot fédéral, Fabius avait ressorti ses discours sur l'Europe sociale... de 1989, Alain Juppé avait tenu la main d'Helmut Kohl qui avait tenu la main de François Mitterrand. Les Français, tous les leaders français, avaient fait comme si l'Europe n'était qu'une grande France, une sorte d'Empire napoléonien ressuscité, que nos élites pouvaient à la fois couvrir de nos chères préfectures et de nos idées politiques géniales.

Et maintenant, ils redescendent sur terre. Le seul titre de gloire du prochain président de la Commission européenne, José Manuel Durao Barroso, est d'avoir organisé le fameux sommet des Açores, où se sont réunis, à la veille de la guerre en Irak, Bush, Blair et Aznar. Jacques Chirac s'est ainsi aperçu que l'élargissement de l'Europe donnait à l'Angleterre une majorité solide dont elle entendrait bien se servir. Même soudée à l'Allemagne, la France est devenue minoritaire. Le «moteur de l'Europe» est encrassé. Les «patrons» de l'Union sont renversés. On commence à se rendre compte que le couple France-Allemagne ne peut plus être au mieux qu'une alternative à l'Europe qui se fait, se défait et se refait. Une position de repli face à une (grande) Europe qui suivrait sa tendance naturelle : libérale et atlantiste sans états d'âme, simple «chausse-pied» de la mondialisation. Cette «Françallemagne» ne serait alors plus qu'une digue continentale et lotharingienne assiégée par les assauts du grand large. La terre submergée par la mer.

Mais les opposants socialistes à Chirac ne peuvent même pas s'en réjouir. … Invitant Zapatero à Toulouse, le 9 juin dernier, François Hollande a fait semblant de ne pas remarquer que le premier ministre espagnol avait refusé de signer la charte pour l'Europe sociale que lui présentait son «amigo François». Mais, anecdotique en soi, la question des accords passés au Parlement européen entre PPE et PSE est révélatrice de l'isolement des socialistes français. Même nos alliés allemands, cette fois-ci, refusent de les suivre. Pendant des années, les chrétiens- démocrates et les sociaux- démocrates se sont passé la rhubarbe et le séné des présidences, commissions, fanions et voitures de fonction. Petits arrangements entre amis fondés sur une véritable proximité idéologique entre chrétiens-sociaux et sociaux-chrétiens.

Mais, depuis les années 80, le PPE a viré à droite, de plus en plus libéral, de moins en moins social ; de plus en plus eurosceptique, même, avec l'entrée en son sein des berlusconiens italiens et des conservateurs britanniques. Les socialistes ont suivi cette course à droite. Et aujourd'hui, lorsque François Fillon explique que «le gouvernement Raffarin est plus à gauche» que ses collègues sociaux-démocrates européens, il n'est guère démenti. Lionel Jospin se justifiait déjà en relevant pertinemment qu'il «était le plus à gauche en Europe».

C'est justement parce qu'il a tiré les leçons de cette évolution du PPE que François Bayrou le quitte. Pendant la campagne électorale, Bayrou, qui n'a rien d'un libéral, a prôné une Europe fédérale qui parlerait d'une seule voix face aux «titans» de la planète. Il pouvait difficilement se retrouver dans le même groupe que les conservateurs britanniques qui refusent l'euro et les Italiens berlusconiens qui se trouvent fort bien sous le parapluie américain. Mais, pour constituer un groupe parlementaire, Bayrou est contraint de s'allier avec n'importe qui, libéraux anglais favorables à l'entrée de la Turquie que l'UDF refuse avec véhémence, des radicaux italiens ou un Daniel Cohn-Bendit, guère hostiles au mariage homosexuel que le chrétien Bayrou rejette avec horreur.

Ainsi va la vie des Français dans l'Europe nouvelle, entre Bruxelles et Strasbourg, entre naïveté et rouerie, entre grands principes universels et arrière-pensées hexagonales, entre idéalisme et lâcheté, entre arrogance et mépris des rapports de forces. A voir les réactions des autres, on constate que les Français surprennent, exaspèrent ou amusent. Le plus souvent, ils sont incompris. Comme des dinosaures ? Depuis des années, on nous explique doctement qu'il faut faire l'Europe pour ne pas être isolé. On l'a échappé belle.

(Merci à Douglas)

2004/08/19

Life in the 'New Iraq' Is Terrible:
Take Le Monde's Word or It

When the independent newspaper must interview somebody, of course it must be a someone from a government-financed agency who can be counted on to spew anti-American messages ("the United States have shown to what extent they intend to remain masters of the political process", "the situation gives the impression of a deplorable waste", "the acting government being perceived as the vassal of its American godfather", "the courage" of Moqtada Al-Sadr), messages that the Le Monde interviewers (in this case, Mouna Naïm), as usual, can be counted on to repeat — and elicit — in their questions ("Isn't the 'new Irak' being built in the image of the fallen régime: nepotism, corruption, authoritarianism?").

The funny thing (so to speak) is that David Baran says many correct things, but because these truths are considered pro-American ("the parallel [in your question] would appear troubling unless one considers the arbitrariness and the brutality — which are incomparable — of the former régime", "the American intervention [although] perceived as cynical and self-serving, appeared as the only possible solution to an unending status quo; the contest was thus favorable to [Bush's military] intervention"), the (short) sentences are inevitable minimized in the following (much longer) groups of sentences to bring about a general feeling that skewers Uncle Sam.

(This is what can be called "token sentences", sentences that, like certain articles, news-gathering, and letters to the editor are added only to a periodical's print edition so that the owners and editors able to say "Oh, well, of course we are objective and allow all viewpoints to be expressed, see the evidence for yourself", although such viewpoints appear only, say, 4% of the time.)

For instance, after evoking the disorganization of Iraqi institutions, the humiliated and disappointed population, the resentment of the Iraqis, all the American faux pas, and "the heavy responsability of the United States in the current situation", the whole article (and the interview) ends with a paragraph on the "country the instability promises to be enduring. The [basic question, therefore, is the following]: For want of a pacified Iraq, how does one manage the instability while preserving the appearances of a certain progress?"

Of course, under Saddam Hussein, you realize, Iraq was stable. And there weren't any journalists to poke their noses around and sniff out the various problems, big or small, real or imagined, that Le Monde is now making such a huge fuss about. Stability in a country where policemen could come into your home, remove your husband, son, or father, your wife, daughter, or mother, and take them away to be "taken care of" in the city jails (or in the killing fields), now that was something!

Aah, for the good ol' days…

2004/08/18

Courrier des lecteurs

Mathsou écrit (je cite) :
Erik a dit: " J'ai aussi écrit un post sur le fait qu'un couple bagdadi avait appelé leur enfant George Bush. Ce que l'on pourrait croire est assez (!) indicateur"

si en france il existe une propagande anti americaine il existe certainement une propagande pro americaine aux EU donc non ceci n'est pas indicateur de l'etat d'esprit des bagdadis mais seulement de celui de cette famille
Point final. Tout est dit. L'incident est clos. Et sans plus s'y attarder, à Mathsou de changer de sujet.

Chitah, lui, note qu'une mère palestinienne avait appelé son fils "jacques chirac". Mais notez le ton de cet internaute. "Comme quoi, ça marche dans les deux sens", conclut-il. Il semble dire rien de plus que ceci : "Vous n'avez pas à vous féliciter de cette chose, car nous aussi on a notre président auquel il est arrivé la même chose ; alors n'en faites pas trop, ne nous faites pas ch*er." Point final. Tout est dit. L'incident est clos.

Eh bien, permettez que je m'y attarde un peu, moi…

"non ceci n'est pas indicateur de l'etat d'esprit des bagdadis"?!? Ah bon? Tiens? Imaginons qu'un couple de Parisiens (appelons-les M. et Mme Dupont) veuillent nommer leur fils d'après le président des États-Unis. On peut supposer que leurs amis, leurs collègues, leurs voisins, et leurs parents leur déconseillent de donner au petit le nom de George Bush Dupont — même ceux d'entre qui eux aussi sont pro-Bush (ou qui ne sont pas anti-Bush)! — pour éviter les moqueries et le ridicule que le petit aura à subir.

Si les al-Hussein ont nommé leur fils George Bush, on peut supposer que leurs amis, collègues, voisins, et parents n'ont pas beaucoup de raisons d'être inquiétés (pas trop, en tout cas) par cette décision. S'ils ont nommé leur fils d'après un dirigeant étranger, c'est sans doute que la politique de ce dirigeant vis-à-vis de leur pays n'y est pas aussi honnie qu'elle l'est en Europe. Et comme ce sont les premiers concernés (les Irakiens), peut-être qu'on devrait en prendre compte tant soit peu…

Mais quoi! pour Mathsou et Chitah (pour les Français en général?), cela ne veut rien dire. Les deux ignorent (volontairement?) la vraie signification de cet évènement. Ils le mettent dans le contexte de la polémique, ou de la rivalité, France-Amérique. Or, il faudrait peut-être penser en dehors du contexte France/USA de temps en temps.

Comparons avec ce qu'a dit Antoine :

J' étais réuni la semaine dernière avec un consul général de France dans un pays d'Amérique du Sud : le type a éclaté de rire quand je lui ai demandé s'il avait un ou des gardes du corps "vous me prenez pour un américain ?".Tout est dit...
Tout est dit, oui. Quand un message se veut anti-américain, là, oui, tout est dit. Un consul qui donne echo aux proclamations auto-congratulatoires de son gouvernement, quoi de plus naturel que de trancher et d'affirmer sur un ton hautain que "tout est dit"?!

Mais un couple qui prend la décision de donner à leur fils — l'être le plus chéri de leur vie — le nom d'un leader étranger, décision avec laquelle le fils vivra jusqu'à la fin de son existence — là, rien n'est dit. Qu'importe! Ça n'a aucune importance. Tout ce qui compte (ou tout ce qui compterait), ce serait si, comme le dit Quentin (cf "question"), s'ils changeaient le nom du petit. Quand des personnes (irakiennes, palestiniennes, américaines, britanniques, polonaises, ou autres) donnent raison aux Français, on prend cela une signification des plus profondes. Quand ils ne le font pas, ça ne signifie rien. (Rien, sinon que les personnes en question sont simplistes, fourbes, stupides, réactionnaires, lèche-c*ls, des caniches qui "feraient mieux de se taire", etc…)

Cela s'accorde parfaitement dans la logique que les bloggueurs (comme les Américains et tous ceux qui les défendent [bloggueurs ou autres], et contrairement aux Français éternellement lucides) sont simplistes, et/ou partisans, et/ou fourbes, et/ou injustes, et/ou de mauvaise foi, etc, etc, etc…
Et si un message pro-Bush (ou pro-Amérique) est prononcé par, par exemple, l'immense majorité de la population irakienne (des gens bien plus concernés que moi, ou Antoine ou Mathsou ou Philippe n'importe quelle personne en Occident, par "l'ingérence" américaine au Moyen Orient) alors, là, non, rien n'est dit. Là, bizarrement, on ne s'active pas à trouver de leçons mémorables dans les faits. On les ignore, on les minimise, on s'en moque... (C'est ce que Jean-François Revel qualifie de "charmant vocabulaire politique français".)

Philippe pense que "cette guerre était une erreur"! Mais, moi, je pose une question : Qui est-il pour faire une telle affirmation? Ce n'est pas que je veuille être agressif envres lui, car je me pose la même question : qui suis-je pour dire le contraire? En fait, je ne dis pas le contraire. Je me borne à regarder ce qu'en pensent, ce qu'en disent, les premiers concernés (les Irakiens), et je m'aperçois que dans l'ensemble, ils semblent satisfaits de l'intervention américaine et de ses effets. Seulement voilà, pour nombre de Français, si l'opinion ne reflète pas celle, auto-congratulatoire, de l'intelligentsia française, il s'avère qu'elle n'a pas d'importance.

Personne ne conteste le fait que Chirac soit plus populaire que Bush en Palestine et qu'une grande majorité de Palestiniens préfère la politique de Paris avant toute autre politique occidentale. Mais pourquoi personne en France ne veut admettre même la possibilité théorique que la politique de Bush, Blair, Berlusconi, et Aznar puissent être plus appreciée par les Irakiens (bien plus que la politique du soi-disant "camp de la paix").

Écoutez seulement Quentin : "Cet enfant porte-t-il toujours ce nom aujourd'hui ?"

Mais il n'y a pas, comme le prétend Mathsou, seulement les parents de George Bush al-Hussein, et il n'y a pas que les déductions logiques qu'on peut en tirer. Il y a aussi les sondages qui, tous, arrivent au même résultat de satisfaction avec l'invasion. Il y a enfin cet article paru dans Le Monde :

Il est presque impossible, hormis chez les responsables baasistes déchus, de trouver quelqu'un qui soutienne la position de Paris dans la crise . La politique de la France reste très vivement critiquée par les Irakiens. Contrairement à ce que croient souvent les Européens, le fait d'être opposé à l'occupation américaine ne fait absolument pas monter la cote de popularité de l'Europe, ou de tel ou tel pays, en Irak.
Après cela, quel dégré d'importance y a-t'il, franchement, dans le fait que des Occidentaux pensent que la guerre ait pu être "une erreur"?

En ce qui concerne Lance Armstrong, il y a deux choses qui impressionnent les Américains à propos de leur compatriote : 1) Ils l'admirent pour avoir vaincu le cancer 2) ils se demandent pourquoi diable (et de quel droit?!) la poste américaine utilise-t'elle des fonds publics (les dollars des contribuables) pour sponsoriser des courses de bicyclettes sur le vieux continent?!

C'est ce que confirme André Kaspi aussi :

Aux Etats-Unis, c'est un héros, non pas parce qu'il a gagné cinq fois le Tour de France, mais parce qu'il a vaincu le cancer.

Maintenant, certains se plaindront peut-être que j'ai mélangé un peu tout le monde ici. J'en (re)viens à ce que dit Philippe ("Vous ne connaissez rien de mes convictions politiques ni de mon sentiment sur l'état de l'anti-américanisme en France et ce n'est pas sur la base de quelque lignes que vous pouvez me ranger dans une catégorie ou dans l'autre. … Je ne suis pas "les français en question" ni les "bloggueurs français". … Et ne peut on pas discuter de vélo, ou de toute autre question factuelle sans forcément l'analyser comme une marque supplémentaire de la "haine" des français pour les américains, sans prisme idélogique ?).

Or, force est de constater qu'on met toujours en question (!) les Américains, les bloggueurs américains, leurs défenseurs, ou les alliés de Washington. Cela va de Tony Blair le "caniche" aux parents de George Bush El-Hussein en passant par les bloggueurs qui soutiennent Lance Armstrong et les Européens de l'est qui soutiennent Bush.

C'est ce qu'ont en commun les différents internautes ici, et c'est la conclusion qu'on tire après avoir discuté avec la vaste majorité des Français de tous les bords politiques et de toutes les couches sociales. Si vous ne vous rangez pas à leur opinion (auto-congratulatoire), ils mettent en doute votre fiabilité et vous demandent ce que vous faites en France ou pourquoi vous n'émigrez pas en Amérique…

On met en doute les dires des Européens de l'est ; ils feraient mieux de se taire. Si Tony Blair n'est pas une caniche, il est un simpliste. Il est peut-être courageux, comme l'affirme Philippe, mais si "cette guerre était une erreur", il est simpliste ou imbécile. Quant aux parents du petit Georgie, comme on l'a déjà vu, ils feraient mieux de renommer leur fils…

Ici, le débat n'est pas permis. Il faut mettre en question la fiabilité des individus qui ne sont pas d'accord avec les gens lucides que sont les Français. En d'autres mots, on revient à la simplicité, la stupidité, la réaction, la mauvaise foi, la fourberie, et l'absence totale de vision, de générosité, de fraternité, d'humanisme, et tout ce qui caractérisent les Francais lucides.

Regardons maintenant le courrier des lecteurs d'un post du Le Monde Watch:

O : "T'as pas l'impression que tout le monde s'en fout, dis ?"
Poulou : "Non, il le comprend pas.
J'ai deja essayer de lui expliquer mais il continue.
A mon avis, il a postulé au monde et ils l'ont jeté."

Traduction : "T'as pas l'impression que tout le monde s'en fout, dis ?" ("Il aurait mieux fait de se taire")
Poulou : "Non, il le comprend pas. ("Il est stupide")
J'ai deja essayer de lui expliquer mais il continue. ("Il est stupide et borné, en plus")
A mon avis, il a postulé au monde et ils l'ont jeté." ("Ses raisons pour avoir créé ce blog sont fausses ; c'est un menteur et un scélérat, il est de mauvaise foi, et il est fourbe")

La conclusion : On ne peut aucunement lui faire confiance.

Qu'en penses-tu, Philippe? Le message n'est-il pas clair : Si vous ne partagez pas les idées avancées et avant-gardistes des Français lucides, c'est que vous êtes un lâche, un traître, un être fourbe, ou un imbécile. C'est, encore une fois, ce que Jean-François Revel appelle le message "charmant vocabulaire politique français".

2004/07/31

Les infos — pointues! — sur l'Espagne (et l'Irak) que Le Monde laisse de côté

À l'occasion des 100 premiers jours du nouveau pouvoir socialiste en Espagne, Le Monde a consacré une partie de la une, l'entière page 2, et un bon tiers de la page 3 à "La nouvelle société de José Luis Zapatero". L'on y trouve une interview du premier ministre espagnol, une récapitulation des 100 premiers jours de son gouvernement, un article sur la commission d'enquête sur le 11 mars, et un papier sur… le mobilier sobre de Bambi. (Tout est bon pour faire comprendre au lecteur à quel point Zap, contrairement à José Maria Aznar, est un homme du peuple.)

Personne ne s'étonnera que, comme à leur habitude, les journalistes (Jean-Marie Colombani en personne et Martine Silber) posent des questions dans un sens qui conforte le Quai d'Orsay ("Peut-on dire que l'alliance entre José Maria Aznar et Tony Blair avait été trop loin dans une dérive presque antieuropéenne ?").

Ce qui est étonnant, c'est qu'à aucun moment, ni ce jour ni pendant les jours qui ont procédé ou suivi, le quotidien de référence ne semble pas avoir écrit un seul mot sur le scandale du jour — la crise entre Madrid et Canberra.

Australia aggravated a diplomatic row with Spain yesterday by accusing the socialist government of encouraging terrorists. Brushing aside the furious response to earlier comments pointing the finger at Madrid, Alexander Downer, the foreign minister, said he would not apologise.

He said that Spain and the Philippines needed "to face up to the truth" that by withdrawing their contingents from Iraq they had allowed themselves to be exploited by terrorists.

"There is no point in trying to scurry away from the truth," Mr Downer said. "I am sensitive about the fact that terrorists use the examples of Spain and the Philippines to put pressure on Australia. If you accede to the demands of terrorists, they will exploit the acceding to their demand . . . We are not going to apologise. We shall let bygones be bygones."

The comments caused great offence in Madrid. Australia's ambassador there was summoned to be told that the comments were "unacceptable".

Quasiment pas un mot dans le quotidien de référence. J'espère que l'ambassadeur australien aura répondu qu'il ne voit pas pourquoi les Espagnols (et les Français) auraient le droit de traiter les membres de la coalition de caniches, et cela de leur piédestal non-interventionniste passif où ils ne risquent (plus) rien ; et pourquoi les Australiens, qui, comme leurs alliés (ceux qui ne sont pas rentrés chez eux), font face au chantage et aux menaces des terroristes (car activement impliqués avec des troupes sur le sol), n'auraient pas le droit d'avoir leur opinion sur les menaces en question et ce que ceux-ci ont accompli, justement, par rapport à leurs (ex-)alliés.

Car il est vrai que dans le domaine des injures, on revient dans le deux poids, deux mesures. On a tout à fait le droit de ridiculiser et de fustiger les USA et leurs alliés, mais qu'on ne s'avise surtout pas de mettre en doute les bonnes intentions, la rationalité, l'humanisme, la vision avant-gardiste, l'amour de la paix, et la lucidité (ainsi que le courage) des tenants du camp de la paix.

Le Monde avait par ailleurs écrit un éditorial indiquant clairement qu'il était indécent de même entretenir l'idée que l'Espagne ait pu faire preuve de peur (ou de lâcheté), ou que les résultats des élections aient pu s'apparenter à un nouveau Munich. Thèse méprisante, tranche le journal indépendant, sans concessions. (On a l'impression qu'ils pensent que les Australiens, comme les Américains et les Britanniques, devraient remercier les Espagnols d'avoir quitté l'Irak et de s'opposer a Washington et ses alliés, à l'image des Français (!).)

Mais traiter les Américains et leurs alliés de caniches, de menteurs, et de salauds, ça, quoi de plus naturel?! Cela n'est aucunement méprisant, n'est-ce pas?! Ben voyons.

Voyons maintenant ce que dit Mohammed, un bloggueur de Bagdad (en évoquant l'attaque de Baaqouba qui a fait 70 morts) sur cette crise ainsi que sur la position et la politique des membres du "camp de la paix" :

Tens of victims in a barbaric action committed by those terrorists leaving pain, sorrow and a deep wound in the heart. Once again, civilians pay the highest price and once again terrorists show how cruel they are, reminding us of their hateful presence and their lust for killing and destruction.

What hurts more than this daily terror is the soft way the world is using to deal with the situation.

I believe that the presence of this terror is just a matter of time, as hatred and deception can’t last forever, but the reactions of some parts provide it with the support it needs and give it a second chance. Yes, all we need is the will and determination to crush a company that is so close to bankruptcy but the disgraceful doings of some parts postpone it once again, like what Spain, Manilla and Egypt lately did.

What’s even worse and disgusting is that these governments smugly come and ask the admirably determined nation Australia to apologize while it’s them who must apologize to the whole world for their awful mistakes that encouraged terrorists and reassured them that their criminal tactics can work.

These countries have found excuses for terror and gave the terrorists the motives to carry on with their plans as long as these plans can make "sovereign countries" yield in front of a true criminal action.

They’re cooperating with the criminals and they make it easier for terrorists to increase their activities in Iraq and elsewhere. This is the goal of terror and this is what these countries offered the terrorists on a gold plate. They’ve said clearly "do more of your work, as it will definitely bring an outcome that satisfy your sickness and illusions".

Perhaps it’s become obvious that the failure of terror is getting closer, and tightening the control over its resources is what made terrorists adopt this new strategy of asking for millions of dollars as ransoms for each hostage saying that this money will be used to pay compensations for the victims in Fallujah.

This reveals the fact that the terrorists’ resources are no longer sufficient to their expenses and this is what made them seek financial support through these criminal operations.

…There’s a deal to fund terror in a different way than before and there are groups and countries who support this and maneuver to override the obstacles.

Negotiating with those thugs provides them with legitimacy let alone submitting to their demands and funding them.

This is totally rejected and it must be dealt with firmly while those who submitted to the terrorists must apologize; they gave a broke company a new chance.

What happened today is a crime and these countries are partners in this crime whether they accept this fact or not. No can make us believe that these governments care about their citizens more than the governments of the USA, Italy, UK, Australia and other coalition members. Can anyone answer the question why those governments didn’t submit to the demands of the terrorists in their own lands, like Abu Sayaf in Philippines?! The same applies to Egypt when dealing with the Islamic groups. Why was the sound of gunfire the only sound we heard when dealing with terror in their own lands? I believe the answer lies in the hypocrisy of these governments. They don’t care a sh*t about the lives of their citizens but they do care and A LOT about their individual and partisan interests. They follow the mob instead of leading them to what’s better for their future.

Concernant les sondages qui indiquent une majorité des populations (en Espagne, au Royaume-Uni, etc) étant contre la guerre (nb : tout ce qui est souligné ici l'est de moi) :
A good and wise government should be able to see farther than the average simple citizen and also to share this vision with him and let him see where his/her interests and security lie. What these governments are doing is the opposite, as they use the simple and instant reactions of the crowds to strengthen their position saying "we have fulfilled your demands and acted just the way you wanted" However what the people want, and especially when they are faced with a shocking and a threatening situation, is not necessarily what they need.

Can you answer the question what will be the response of Iraqis towards these horrible attacks? I’ll help you; These victims came to volunteer to serve their country as IP members and this is not the 1st time this happens and the response of Iraqis to such attacks was always more volunteers and longer lines. What does that tell you Philippine and Spanish government? If this is bravery and wisdom, then how should your actions be labeled? Maybe it’s not your business? That would’ve been a more honest answer had you said it, but you’re not just cowards or stupid, you’re also hypocrites. This include all the "anti-war" crowd with all the clowns there such as Michael Moore and George Galloway and their likes. You make me SICK when you support the "Iraqi resistance" and call these killers a revolutionists. Did you watch your "resistance" today? This is what you support and this is how history will view you; supporters of murderers and criminals, and for what? Fame and money! Enjoy it. It won’t last, as the truth will soon be revealed and you'll be exposed to all as the disgusting parasites you are.

I doubt that we can forgive you all for your cowardice, stupidity and hypocracy just as we’ll never forget the sacrifices and the help of the Americans, Australians, British, Italians, Japanese and all the other coalition members.


PS : le quotidien de référence ne semble pas avoir fait grand cas de cet entretien de l'AFP qui contredit quelque peu les dires de Zapatero (José Maria Aznar et Tony Blair "avaient un pied en Europe, parce que nous sommes en Europe, et un pied dehors pour freiner l'Union européenne") :
Mario Monti … believes the Berlusconi government has been too compliant in its dealings with France and Germany. "There's no point in doing favours which will not be returned, to win the sympathy of the powerful."

The outgoing EU official said that Italy should understand "that France and Germany, to which the Union owes a great deal, today represents a brake on integration."

"Ten years of experience in Brussels have convinced me that, to be competitive, Europe must be more liberal."

"In simple terms, the Blair-Aznar alignment has shown itself to be more useful than the Chirac-Schröder one," he said.

He is particularly scathing of France, which he scores for favouring the short-term interests of some big national companies to the detriment of EU economic development in general.

"France has become a problem for itself and for Europe. It cannot handle its successes, and often it doesn't see them, and attributes its setbacks, which are often imaginary, to Europe."

Non, mieux vaut privélégier un analyse (de Philippe Ricard) sur "l'intraitable M. Monti", "mystérieux", dont le "style personnel a parfois dérouté ses interlocuteurs".

(Thanks to Gregory Schreiber)
Read the English version

The American People Have Been Great to Us Iraqis

Les Yankees qui sont humains et fraternels?!

Les capitalistes qui font des BAs, et cela gratuitement, sans rémunération!?

Le peuple américain qui "a été génial" et qui traite les Musulmans et les Irakiens comme des êtres humains?!

Ça ne peut (!) pas être vrai! Cela doit (!) être, cela ne peut être que, de la propagande!

Unable to get her [handicapped] son proper treatment in Iraq or Jordan, where she had been living, [Hala] Mousawy managed to quickly round up help in New York through her job.

"Imagine trying to receive health care for the chronic condition where he's been," [said Dr. Saadi Ghatan, the neurosurgeon who led the operation]. "It hasn't been easy." Dr. Kevin Cahill, president of the Center for International Health and Cooperation, hooked Mousawy up with the children's hospital, which agreed to do the surgery for free.

"The American people have been great to us," Mousawy said. "It doesn't make a difference for them that we are Iraqis or Muslims — they're just looking at us as people."

(Thanks to Gregory Schreiber)

2004/07/30

Ce sont les Américains qui seraient simplistes et qui verraient le monde en noir et blanc?!

Sur le site David's Medienkritik, un internaute qui a vécu cinq ans en Allemagne évoque la perspective étroite qu'il a rencontré dans le pays de ses ancêtres. (Obs : Demandez-vous si, dans son témoignage, on peut remplacer le mot "allemand" par "français".)
Mes amis allemands objectifs évoquent continuellement le "fait" de la "simplicité" américaine et de leur vision du monde en "noir et blanc", contrastée avec la perspective européenne plus "complexe" et "sophistiquée" sur les mêmes évènements.

Et pourtant, mes observations ne soutiennent pas cette thèse. C'est le rare Allemand que je rencontre qui ne considère pas que le Président Bush est "stupide", qu'il a "volé les élections", qu'il mène une "guerre pour le pétrole", qu'il est un "cowboy", un "unilatéraliste", etc, etc, etc… Répéter comme un perroquet le sujet de la semaine de Time/Newsweek/Stern/Spiegel[/Le Monde/Libération] ne me semble pas être exactement une opinion personelle "nuancée" et "réfléchie".

…Alors je pense que nous pouvons nous mettre d'accord que certains ne font que suivre le mouvement de la "pensée de groupe", seulement voilà, je ne suis pas convaincu que ce soient les Américains. Sur tellement de sujets je suis abasourdi à quel point la plupart des Allemands sont mal informés, ou à quel point ils sont disposés à recueillir leur information des points de vue les plus extrêmes (toujours négatifs) en Amérique. Michael Moore est un prophète. fromthewilderness et moveon.org sont la parole d'évangile. Chaque critique ou erreur américaine est prise au pied de la lettre, toute nouvelle positive est suspecte!

…L'omniprésence de la pensée de groupe fait plutôt peur. …Cette étrange transférence, où tout ce est allemand (européen) est bon et tout ce qui est américain est mal. La réécriture de l'Histoire, avec Chirac en Normandie qui ne mentionne pas la contribution américaine. … Le bobard de "la guerre de Bush pour le pétrole" qui ignore la dépendance de l'Europe, pas de l'Amérique, sur le pétrole du Moyen Orient, qui ignore les contrats pétroliers de la Russie ($ 9 milliards) et de la France ($ 8 milliards) avec le régime criminel de Hussein. …L'ignorance presque totale et obstinée du fait de la complicité européenne historique dans chacun des problème dans le monde que les États-Unis affronte ou n'affronte pas aujourd'hui.

2004/07/25

Encore des photos horripilantes de l'Irak…

Encore des photos "dégueulasses" de l'occupation "humiliante" américaine en Irak…



(Ça ne s'arrête jamais, n'est-ce pas?)

(Merci à Gregory Schreiber)

2004/07/14

L'un des pires reproches pour un politicien français

Dans leur interview de Nicolas Sarkozy pour Le Monde, la dernière question de Sophie Fay, Hervé Gattegno, et Christophe Jakubyszyn au ministre de l'économie concerne son prétendu pro-américanisme :
On vous reproche, notamment parmi les chiraquiens, un tropisme américain trop prononcé. Qu'en dites-vous ?

Si cette querelle m'est faite, elle est bien étrange. Les Américains sont un des rares peuples au monde avec qui nous n'avons jamais été en guerre. Ils nous ont aidés deux fois à nous libérer. Il serait paradoxal d'attendre d'eux le retour de la croissance tout en les critiquant sans cesse. Nous avons un désaccord sur l'Irak. Cela ne doit pas remettre en cause l'amitié réelle qui existe entre nos deux peuples. Je respecte la société américaine, mais je suis lucide sur ses faiblesses et ses forces. Le modèle américain ne me paraît pas transposable en France. Si c'était la crainte, ma réponse devrait lever toute ambiguïté !

Ce que je trouve étrange ici, c'est qu'aucun Français n'aurait jamais cherché querelle à quiconque concernant un tropisme allemand trop prononcé, un tropisme russe trop prononcé, un tropisme chinois trop prononcé, un tropisme arabe trop prononcé, un tropisme irakien trop prononcé (sous le règne de Saddam Hussein), etc. Il n'y en a, toujours, que pour les Ricains. Encore une fois, je le répète, cela doit venir du fait que les Français ont bien compris d'où venait le véritable danger dans le monde…

2004/07/07

"Absolument aucun reportage en Allemagne sur les développements positifs en Irak"

Et en Allemagne, les médias sont-ils un peu moins partisans qu'en France? Lisez une lettre parue dans le Frankfurter Allgemeine Zeitung, et traduite par les services de David's Medienkritik.
Today, supporters of the war are no longer to be heard. Has it then, aside from the question of weapons of mass destruction, been so clearly shown that they were wrong? One could draw a better judgment if the F.A.Z. would not exclusively to report on the political development and the violent clashes. (...)

One hears very little about these positive aspects of the development in Iraq in the German media including the F.A.Z. Those interested are unfortunately dependent upon the website of the American government. I read there for example that more than 2300 schools have already been reopened, that the building of a further 4500 schools is planned in the next four years, that more than eight million school books have been printed and distributed, that almost all children are going to school again, that this year 950 million dollars are being spent on the health care system (under Saddam Hussein: 16 million dollars in 2002) that everywhere in the country women’s centers are being opened and so on.

All propaganda? Hard to judge as long as there is virtually no reporting on this aspect of the development in Iraq on the part of independent media. Next to politics and acts of violence, scandals, at the most, are seen as worth reporting. When Americans, in an unforgivable manner, brutally abuse dozens of prisoners, it is rightfully made into a matter which is reported on in great detail for weeks at a time.

But when it comes to the building of the Iraqi school system by other Americans, which carries significance for hundreds of thousands of boys and girls, there is, as far as I can see, absolutely no reporting on the matter in Germany. It would also be of great interest to me what the newly won freedom of opinion, for example in the universities, means to the Iraqis. But I have searched in vain, also in my Frankfurter Allgemeine, for reports on such themes.

2004/07/06

George Bush fête son anniversaire
le 11 juillet (il sera âgé d'1 an)

This nation is peaceful, but
fierce when stirred to anger

George W Bush

Dans cinq jours, George Bush fêtera son anniversaire. Certains diront que ce n’est pas vrai, que l’anniversaire du président américain, c’est aujourd’hui. De toute évidence, nous ne parlons pas de la même personne. Et le George Bush auquel je pense ne fera pas beaucoup la fête, en fait, puisqu’il aura 1 an.

Le George Bush auquel je pense n’est pas celui dont le nom complet est George Walker Bush, ni celui dont le nom complet est George Herbert Walker Bush, mais celui dont le nom complet est George Bush Abdul Kader Faris Abed El-Hussein (sans relation aucune avec Saddam). Et ce George Bush-ci naquit à Bagdad le 11 juillet 2003.

D’après mes renseignements, les parents de George Bush ont nommé leur fils d’après un leader occidental qu’ils admiraient particulièrement. Cet homme a dû les impressionner, pour qu’ils donnent à leur fils le nom de quelqu’un qui ne soit pas de leur foi, avec un nom dont les racines ne sont pas de leur culture. (Un peu comme si un Occidental — mettons, quelqu’un du clan Bush — donnait à son nouveau-né un nom tel que celui de Mohammed Ahmed Youssouf Bush.)

Une idée me vient à l’esprit. Peut-être que l’Occident devrait envoyer des représentants à Bagdad. Des gens comme ceux que David Brooks appelle “les membres de la brigade des railleries”, “les charlots des cellules de réflexion et le reste de la communauté des commentaires” dans “leur mode habituelle du ciel qui nous tombe sur la tête” — des gens comme José Bové, François Hollande, Jacques Chirac, Gerhard Schröder, José Luis Zapatero, Jean-Marie Colombani, Dominique Dhombres, Plantu, Willem (pour ne mentionner que les Européens), etc… Ils pourraient choisir quelques intellectuels connus, les “armer” avec les arguments habituels, et les envoyer à Bagdad.

Et une fois sur place, ils devraient essayer de retrouver les parents de George Bush. Une fois que le couple aura été localisé, ils devraient patiemment essayer de leur expliquer la vérité. Cela incluerait les faits incontestables suivants…
• que la guerre n’avait pas de raison d’être, et fut conduite pour des raisons inavoués (et inavouables)
• que l’Irak, et le monde, allaient bien mieux avant le conflit
• que la présence de soldats étrangers (de surcroît, infidèles!) représente une humiliation pour le petit George Bush et ses concitoyens
• que leur sentiment primaire envers l’Amérique (ou en tout cas, l’administration Bush) ne peut être autre que l’amertume, à cause de la situation actuelle, dans laquelle des milliers d’Irakiens (avant tout des membres du parti baasiste) ont été tués en plus d’un an (un peu plus que la vie du petit George Bush) et regretter la situation antérieure dans laquelle ces membres du parti baasiste tuaient des milliers d’Irakiens tous les mois, dans la plus parfaite impunité
• que, contrairement à de George Bush, eux, les membres plus-humanistes-que-nous-tu-meurs du “camp de la paix”, ne pensaient (et ne pensent) qu’aux meilleurs intérêts des concitoyens de George Bush
• oh, et bien sûr, que l’homonyme de George Bush n’est rien de plus qu’un clown et un sacré menteur.

Une fois que les parents du petit George Bush auront été convertis à la vérité à la mode le ciel est en train de nous tomber sur la tête, “les membres de la brigade des railleries” pourront aller travailler sur les autres membres de la population d’Irak.

Les membres de “la communauté des commentaires” pourraient commencer avec Mohammed, Ali, et Omar, les trois frères d’Iraq the Model et aggrandir le cercle, pour inclure les Irakiens qui ont perdu mains et langues aux mains des brutes de Saddam, qui ont été défigurés à l’acide, dont les mères, les sœurs, et les filles ont été violées, et dont les parents, les frères, et les fils ont été abattus et jetés dans des tombes anonymes. Avec de la chance, “les charlots des cellules de réflexion” pourraient éventuellement atteindre le gros de la population, ceux qui, dans un sondage après l’autre, se déclarent satisfaits par une guerre qui a renversé le boucher de Bagdad et qui ont une vision plus optimiste de l’avenir que jamais.

Rassemblons-nous, pour leur souhaiter bonne chance, à ces VIPs de la pensée unique, et leur faire savoir à quel point nous souhaitons que leur mission sacrée se passe bien.

Oh, j’allais oublier: Joyeux anniversaire, George!

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2004/07/04

Réflections sur le patriotisme américain

Le 4 juillet est le jour national américain. Un jour, en France, comme un autre pour se lamenter de leur patriotisme regrettable. Une critique de films illustre cette prise de position par rapport aux Américains. Quand sortit La Chute du Faucon Noir, la critique du “quotidien de référence” descendit le film en flammes, et dans la foulée, elle lâcha une bordée sur En territoire ennemi. Pourquoi? Parce que ces films étaient mal filmés? Non. Parce que le jeu des acteurs était approximatif? Non. Parce qu’ils prenaient des libertés avec la vérité? Non plus, en tout cas pas trop : tous deux étaient basés sur des faits réels (l’un évoquait l’hécatombe des populations en Somalie et l’autre parlait des charniers serbes des guerres dans l’ex-Yougoslavie).

Non, les films furent incendiés parce qu’ils présentaient une “idéologie contestable” et “des visées propagandistes”, c’est-à-dire “une valeureuse image du patriotisme et de l’endurance des soldats américains”. Et au critique de s’indigner que les soldats d’Aidid sont montrés en tant que “sadiques, tricheurs, vicieux […] les alter ego des Germains sauvages […] dans Gladiator, du même Ridley Scott.” Metteur en scène que le critique regrette de ne pas montrer “le racisme ordinaire de certains soldats américains ou à s’interroger sur la politique africaine du président Clinton”. (Le critique n’est visiblement pas au courant que la genèse du film tient en grande partie à la contestation de la politique de Clinton et que des titrailles à la fin du film expliquant ceci n’ont été retirées qu’à cause des attentats du 11 septembre.)

En d’autres mots, le patriotisme US serait d’un tel danger, et d’un tel ridicule, que même au centre des pires atrocités en Europe depuis la Seconde Guerre Mondiale, et même en pleine tuerie de masse de populations affamées, c’est ce fléau sournois-là qu’il faut combattre et dénoncer par tous les moyens. Il est tellement insipide qu’il éclipse les crimes des seigneurs de guerre somaliens et des dirigeants yougoslaves. Que les milices aient effectivement mitraillé la population somalienne, quelle importance comparée au fait que certains G.I.s aient pu émettre des propos racistes! Qu’importent les charniers en Bosnie? Qu’importent les massacres à Mogadiscio? Par comparaison avec le simple fait que Hollywood puisse penser à sortir des films qu’on pourrait qualifier de patriotiques, et le terrible danger que cela représente, ces atrocités semblent s’évaporer dans la modicité.

Pour revenir à la scène internationale proprement dite, un grand quotidien français se demande si on ne doit "pas craindre l'instauration d'une Pax americana". Est-ce qu'on rêve ici ou quoi! La raison pour laquelle je trouve cette accusation profondément offensante est que pendant quatre années, la guerre a sévi chez les ex-Yougoslaves. Il y a eu des meurtres, des tueries, et des viols. Des crimes, des charniers, et un génocide. Maintenant, enfin, la communauté internationale a su y mettre fin (mais pour combien de temps — l'avenir nous le dira). Mais parce que ce sont les Américains qui y ont mis fin, on s'abstient de s'en féliciter. De mémoire d’homme, les Serbes sont parmi les pires criminels à mener une guerre en Europe depuis 1945, et leur carrière est terminée, du moins pour le moment. Mais pour quel danger s'alarment certains Européens? Que la paix soit venue des Américains…

Le Patriotisme U.S.

Je comprends tout à fait l’ironie cinglante à propos du patriotisme US, tant de la part de contestataires américains que d’habitants d’autres parties de la planète. Après tout, l’Amérique n’est-elle pas cet ensemble dont “l’existence même est un crime” et n’est-elle pas à la racine de tous les malheurs du globe de ces dernières 50 années? Si cela est vrai, alors le patriotisme ne peut être qu’un leurre dangereux ou une espèce de maladie ou de superstition, des gens qui croient — comme ils sont ridicules! — aux sorcières et aux bonnes fées.

Car chacun le sait : toute société qui n’offre pas les garanties et la protection sociale du type européen ne vaut pas la peine d’y vivre ou d’y croire, et tout régime qui ne tente pas de s’en nantir ne vaut pas la peine de rester au pouvoir. Et toute personne qui pourrait penser le contraire ne peut être que sous le charme d’un écran de fumée qu’on ne peut que regretter, déplorer, et moquer. Alors, l’Amérique, avec son “envie d’en découdre” et son “excès de testostérone” qui a “enfiévré le pays” est évidemment d’un ridicule, et d’un danger, sans précédents.

Des amis à moi reviennent des États-Unis avec le même sentiment d’exaspération à la bouche : comment peut-on être aussi patriotique, c’est-à-dire aussi superstitieux?

Je leur réponds que l’on m’excusera, mais je ne sais pas de quoi ils parlent. Que se passe-t’il quand on va aux États-Unis? On voit beaucoup de bannières étoilées et… c’est à peu près tout. Non? On ne voit pas des manifestations hystériques scander à travers les rues. On ne voit pas des banderolles “Down with the Taliban” ou “Death to Iraq”. On n’entend pas les “cowboys” crier “Vive la guerre!” Je n’ai pas vu d’Américains mettre le feu à des drapeaux afghans ou irakiens (ou vietnamiens). Je n’en ai pas vu lancer des tomates ou des cocktails molotov sur l’ambassade soviétique ou chinoise.

Quant aux alarmistes qui préconisent aux Américains (et aux autres) de ne pas faire l’amalgame entre les terroristes et l’Islam, soit — pour le plus grand bonheur du monde — leur appel a dû être entendu. Ou alors… les Américains ne seraient peut-être pas si débiles, et retardés, que veulent bien le croire les alarmistes en question (qui, de ce fait, ne seraient peut-être pas, contrairement à ce qu’ils semblent penser, les seuls à être assez intelligents pour ne pas faire d’amalgames inconsidérés). En effet, quand on fait valoir que George W Bush a fait un discours dans une mosquée américaine, ou qu’il ait observé le Ramadan, ou qu’il ait évoqué un plan Marshall pour l’Afghanistan, on étouffe de rire ou de mépris, car évidemment cela ne peut être que du pipot. Or, contrairement à certains pays de l’Europe, l’Amérique ne rengorge pas de mosquées (ou de synagogues) brûlées et violentées.

En janvier 2002, le Council of American-Islamic Relations avait mis la responsabilité de huit meurtres sur des réactions aux évènements du 11 septembre ; la police confirma seulement l’une, au plus deux, d’entre eux comme motivés par la haine anti-arabe ou anti-musulmane. Dans tous les cas, on est loin de cette peur, exprimée tant en Amérique qu’ailleurs, que les Américains allaient “faire l’amalgame” et déchaîner une vague de terreur contre la population musulmane de leur pays. (Encore une fois, les Européens prônent que sans le concours de leurs précieux conseils, les Américains irréfléchis agiraient de manière irresponsable.)

Nous avons vu qu’en creusant un peu, les activistes ne s’avéraient pas toujours être aussi neutres, idéalistes, et cohérents qu’ils semblent le croire eux-mêmes, mais présentaient bien des inconsistances, tout comme les Américains qu’ils critiquent. Il en est de même avec le nationalisme. Par contraste avec l’ironie exprimée à l’encontre du patriotisme américain (et des pays occidentaux), ils semblent souvent s’émerveiller devant la fierté nationale des PVD quand leurs peuples (ou plutôt, leurs leaders) évoquent leurs “aspirations nationales” et la construction et l’avenir de leurs nations.

Au lendemain du 11 septembre, donc, les Américains ont sorti les Stars and Stripes, ils ont apporté leur soutien au président en place, et ils se sont retroussés les manches pour aller au travail. En tant que trait de caractère qui serait hautement risible, je trouve le patriotisme plutôt solennel et “low-key”. Et il n’y a rien de neuf à cela. Le journaliste Arthur Higbee, un vétéran de la guerre dans le Pacifique, écrit même dans le International Herald Tribune qu’après Pearl Harbour, “très peu de gens ont sorti les couleurs, et personne ne portait un badge à l’effigie du drapeau. Il n’y avait pas besoin d’agiter la bannière. Le ton de la nation en était un de sombre détermination”. “Grim determination” : voilà une description du ton de l’Amérique patriotique bien meilleure que la caricature qu’a écrit la pacifiste Dana Burde — “les cris assourdissants réclamant la guerre et la vengeance, combinés à la censure médiatique, ont quasiment noyé les quelques voix qui existaient à gauche” (soit les seules voix qui font preuve de raison et de philosophie, évidemment) — caricature dont la teneur a été reprise dans les journaux français, européens, et arabes.

Mais ce n’est pas seulement en temps de guerre que le patriotisme est plutôt low-key. Alors que nombre de pays favorisent les défilés militaires, le Fourth of July est avant tout la fête ; oh, certes il y a une flag ceremony avec une poignée de militaires présents (un de chaque service — army, navy, air force, marines), mais c’est avant tout la fête, avec des barbecues de hotdogs, de hamburgers, et de spare ribs, des jeux, et un feu d’artifice.

Et s’il y a une place réservée pour les militaires et les vétérans pendant les défilés, que ce soit du 4 juillet ou à d’autres moments de l’année, ils ne sont qu’une pièce dans le puzzle qui comprend aussi les orchestres, les pom pom girls, les floats (les “chars” construits de toutes pièces pour faire la fête), les groupes ethniques (Italiens, Polonais, etc), les cowboys, les Indiens, et les clowns — j’ai déjà eu l’occasion de voir un défilé où les militaires en rang serré étaient précédés, et entourés, par des dizaines de clowns! On pourrait presque en venir à croire que finalement, le patriotisme U.S. n’est peut-être pas si périlleux, ou mystificateur, que cela.

Les Européens évoquent alors certaines expressions des Américains : “face à la vision d’un monde partagé entre « bons » et « méchants », les Européens ont beau jeu de réclamer une analyse plus sophistiquée des relations internationales.” Surtout, ils citent la phrase de George W Bush : “Nous sommes bons”.

Mais que font les Européens sinon dépeindre le monde partagé entre méchants — les Américains simplistes, justement, les capitalistes, les réactionnaires — et bons — les Européens (eux-mêmes, faut-il le souligner?), les «peuples», tous les soi-disant exclus du monde? La vue européenne du monde étant que les Américains ont une vue simpliste du monde à laquelle s’opposerait la vue sophistiquée européenne n’est-elle pas, elle-même, quelque peu… simpliste?

D’un côté, vous avez les abrutis (les Américains) et de l’autre, vous avez les sages (les Européens). En fait, le weblog que vous avez devant les yeux est très consciemment un weblog faisant état à ce que je tiens pour l’évidence même, que la politique des Américains est loin d’être aussi diabolique qu’on le prétend, tandis que celle prônée par les Européens est loin d’être aussi pure, salutaire, et avant-gardiste qu’on le dit. (Avec preuves à l’appui.)

Que dit celui qui, le nez levé, proclame que "nos valeurs et celles des Américains ne sont pas les mêmes"? Ne dit-il pas exactement la même chose? Que nous les Européens sommes bons? Il le dit d’une manière peut-être un peu plus raffinée que les Américains, mais en fin de compte, le contenu du message, c’est la même chose.

Je souhaite a tout le monde a happy Fourth of July!

(Lady Liberty Fireworks: Thanks to Bob Gurfield)