2012/12/30

Nous sommes tous des Depardieu !

La Tribune publie un article de Aurélien Véron, Anne Bourdu, Gaspard Koenig et Charles Beigbeder, membres dirigeants du Parti Liberal Démocrate.
Gérard Depardieu porte bien son nom. "Depardieu" désignait, au Moyen-Âge, le lieu où l'on payait la dîme, impôt inique aboli en 1789. Aujourd'hui, le même patronyme en est venu à symboliser la lutte d'un individu libre contre la folie coercitive de l'Etat. Gérard Depardieu n'a eu droit qu'à peu de considération pour avoir payé 145 millions d'euros d'impôt, de quoi financer la part de l'Etat dans l'aéroport Notre-Dame-des-Landes ainsi que tous les salaires de Jean-Marc Ayrault au cours de sa longue carrière de fonctionnaire.

Gérard Depardieu n'a été guère félicité pour avoir créé 80 emplois et pour ses qualités de chef d'entreprise reconnues par ses salariés, alors qu'Arnaud Montebourg en détruit tous les jours en faisant fuir les investisseurs hors du pays. Enfin, le départ de Gérard Depardieu n'a pas été salué avec le panache qu'on doit lui reconnaître puisqu'il a le mérite précieux d'incarner [tout comme Obélix] une résistance à l'oppresseur : la toute puissante administration socialiste qui asphyxie l'énergie de notre pays jusqu'à l'agonie et voudrait culpabiliser ses sujets de ne pas se laisser faire avec reconnaissance.

Il était temps de réparer cet oubli et d'adresser nos sincères félicitations à Gérard Depardieu d'avoir été un Français d'exception. Tel Cyrano : « un homme affable, bon, courtois, spirituel, libéral, courageux ».

Hélas, à l'heure où toutes les nations du monde se battent pour attirer les talents, notre Gouvernement chasse les siens sous les insultes.

A l'heure où tous les pays d'Europe réduisent leurs dépenses publiques, notre Gouvernement en appelle, ad nauseam, à toujours plus de « solidarité » pour financer les gabegies publiques.

A l'heure où tous les contribuables commencent à se rebiffer, notre Gouvernement ignore les leçons de base de la courbe de Laffer. Il y a deux siècles, le très français Jean-Baptiste Say disait déjà qu'un « impôt exagéré détruit la base sur laquelle il porte ». Aujourd'hui, la maxime est toujours d'actualité : trop d'impôt tue l'impôt.

Le versant que ses détracteurs n'osent pas attaquer, c'est la charge de Gérard Depardieu contre l'hygiénisme de la pensée dominante en France. A travers l'évocation pudique de son fils disparu à l'âge de 37 ans, il expose la violence avec laquelle le modèle français broie ceux qui ne marchent pas dans les clous de la bien-pensance. « Je pars parce que vous considérez que le succès, la création, le talent, en fait, la différence, doivent être sanctionnés » écrit Gérard Depardieu pour justifier son départ.

Il faut admettre que la critique fiscale est plus aisée que de rentrer dans cette dimension contestataire d'un ordre moral inique et hypocrite. Gérard Depardieu s'en est émancipé très tôt, assumant avec drôlerie ses dérapages et ses excès.

Ce que révèle en réalité l'hystérie du pouvoir contre Depardieu, c'est que ce gouvernement et ses affidés ont une fâcheuse tendance à se croire propriétaire de la France et des Français. Propriétaire de la nationalité, qu'il pourrait révoquer (proposition du député Yann Galut, une première depuis Pétain). Propriétaire des biens, qu'il pourrait confisquer (récente innovation juridique de son collègue Jérôme Lambert, inspirée sans doute de Fouquier-Tinville). Propriétaire des talents, qui n'auraient jamais pu émerger sans lui (car, comme l'écrit Philippe Torreton, c'est bien sûr grâce aux subventions de l'Etat que Depardieu a pu enchanter des générations de spectateurs). Propriétaire de la Nation, qu'il associe absurdement à la fiscalité en dénonçant, comme l'a fait en creux François Hollande, les « antipatriotes » ou, notre ministre de la culture, un « déserteur »..

Hé bien, ne vous en déplaise, nous ne vous appartenons pas. Et nous gardons par devers nous les droits que nous accordent la déclaration de droits de l'homme et du citoyen, que vous semblez avoir tendance à oublier : la liberté, la propriété, la sûreté et la résistance à l'oppression.

"Je suis un être libre", écrit Depardieu dans sa lettre : c'est ce qu'ils vous reprochent. Résistons à nos Robespierre aux petits pieds.

Nous sommes tous des Depardieu.

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