2011/05/26

Contre la démagogie de nos gouvernants : est-il interdit de faire valoir que "la voiture est aujourd'hui un risque négligeable" ?


Pour le compte du quotidien Le Monde, Eric Nunès interroge Armand Jung. Le député socialiste du Bas-Rhin et co-président du groupe d'études "Route et sécurité routière" à l'Assemblée prétend que
Ce qu'il faut, c'est de la coercition … Les limiteurs de vitesse, les détecteurs de dangers existent déjà, il suffit de les mettre en place. Nous devons interdire l'usage des kits mains libres au volant.

… Il existe dans notre pays un fort lobby de la vitesse. Alors que 90 % des accidents sont dus à une vitesse inappropriée, nous fabriquons en France des automobiles qui roulent à 220 km/h, 250km/h dans un environnement routier où la vitesse maximale autorisée est de 130 km/h. A l'heure où il faut imaginer la voiture du futur, plus en harmonie avec l'environnement et respectueuse de la vie humaine, personne ne songe à brider les moteurs. Au contraire.
Alors que le site eXtrême Centre se demande si la fronde parlementaire anti-radars n'est pas « a tea party » à la française, les lecteurs du Monde répondent :
On nage en plein delire, le co-president d'un groupe d'etudes qui argumente sur des voitures qui peuvent rouler a 220 ou 250, alors que l'immense majorite du parc doit se situer entre 150 et 170, voir moins. (…)
Encore un "spécialiste" de la sécurité routière bien au courant de son dossier, car : 1. aucun constructeur français ne propose à ce jour de voiture atteignant la vitesse de 250 km/h... 2. un nombre infime d'accident a lieu à plus de 150 km/h. 3. on peut rouler à une vitesse excessive tout en respectant les limitations de vitesse, et oui ! 4. Aucune Volvo dans le classement des 100 premières "voitures citoyennes" en septembre 2010... Quant au fort lobby de la vitesse en France, je rie...
Je ne suis pas très douée en maths, mais 4000 morts par an pour une population de 65 millions de Français, cela représente 0,01%. Si on compte, parmi ces 4000 morts, tous les tarés qui tentent de fuir la police par tous les moyens parce qu'ils n'on pas de permis, qu'ils conduisent une voiture volée ou qu'ils sortent d'un braquage, on peut dire que la voiture est aujourd'hui un risque négligeable. OK un mort est un mort, mais il faut quand même arrêter le délire. Il n'y a pas de risque zéro.

2011/05/25

Les médias français ne veulent pas admettre qu’ils ont eu tort de s’emballer pour Obama qui n’a jamais rien fait pour mériter une adoration pareille

Sur le site d'Atlantico, Evelyne Joslain, auteure du livre Obama : de la déconstruction de la démocratie en Amérique, répond aux questions de Amaury Brelet.

Atlantico : Quelle est la part de responsabilité de l’Administration Bush dans l’élimination d’Oussama Ben Laden ?

Evelyne Joslain : 99 %, parce que c’est bien la politique antiterroriste mise en place par l’Administration Bush depuis 2002 qui a joué et contre laquelle Barack Obama a vociféré lorsqu’il était sénateur et tenté d’agir depuis qu’il est Président. Il a donc été obligé de préserver cette politique, critiquée par la gauche la plus extrême mais largement plébiscitée par l’opinion publique et donc incidemment par le Congrès.

Certains ont crié à l’abrogation des libertés avec la décision de George W. Bush de pouvoir libérer les services secrets des multiples entraves qui étaient les leurs et donc de pouvoir procéder à des écoutes d’étrangers ou de conversations entre les États-Unis et l’étranger, ce qui a permis finalement de saisir de nombreuses discussions intéressantes. Il y a également le fait de pouvoir, sans donner préavis, débarquer chez des gens sur lesquels les autorités avaient des doutes précis. Cela fait aussi parti de l’arsenal juridique que Bush a obtenu du Congrès lorsqu’il était Président. Et puis, il y a bien entendu, les fameuses techniques d’interrogatoire musclées dont le “waterboarding” ou noyade simulée qui a été pratiquée sur seulement trois prisonniers à Guantanamo, notamment sur Khalid Cheikh Mohammed (ndlr : "cerveau" des attentats du 11 septembre 2001 et numéro 3 d'Al-Qaida) qui a fini par craquer. Mais il faut savoir que cette technique d’endurcissement, que les GI, les Marines et les autres corps de l’armée américaine s’infligent à eux-mêmes, n’a absolument rien à voir avec de la torture véritable. Le ministre de la Justice Eric Holder a même voulu un temps juger Khalid Cheikh Mohammed devant un tribunal civil de New York, mais devant la pression populaire répercutée au Congrès, cette idée a finalement été abandonnée.

… chose incroyable, [le ministre de la Justice] Eric Holder a préféré faire la guerre aux services de renseignements plutôt qu’aux terroristes : plusieurs officiers américains sont maintenant inquiétés par le département de la Justice sous l'oeil bienveillant du Président. Donc ce succès pour Obama est en fait très mitigé. Il a tout de même le mérite, contrairement à Bill Clinton, d’avoir accepté quand on le lui a proposé, de presser la gâchette.

Mais ce que personne ne dit apparemment en France, c’est qu’il aurait pu également dire : “Je le veux vivant”. Bush avait déclaré en 2002 : “Mort ou vivant, peu importe”, or depuis, on a découvert justement qu’il était utile de faire parler un terroriste ; la gauche américaine pacifiste aurait bien entendu hurlé au loup si Ben Laden avait été pris vivant et si on avait voulu le soumettre aux interrogatoires. Obama a multiplié les attaques meurtrières de drones et on lui pardonne, la presse ne dit rien parce c’est lui. Si cela avait été Bush, toute la presse en parlerait. Obama a opté pour cette issue parce qu’il préfère un terroriste mort à un terroriste vivant. Il bien compris qu’il ne pouvait pas faire autrement que de soumettre les terroristes — fut-il Ben Laden — aux interrogatoires militaires et ce, en raison de l’opinion qui refuse absolument que ces gens-là soient jugés comme des criminels de droit commun devant des tribunaux américains. Obama est pieds et poings liés, car d’un côté, sa base pacifiste le tient, et de l’autre, il a besoin d’un coup de pouce pour faire remonter sa cote dans les sondages. S'il a eu le mérite d’avoir donné le feu vert pour qu’on abatte Ben Laden, un président plus déterminé et surtout entouré de gens plus attachés aux intérêts américains aurait dit non et refusé de l'abattre pour le capturer vivant comme pour Saddam Hussein en Irak. Si Bush était à la Maison Blanche aujourd'hui, il aurait essayé de capturer Ben Laden vivant, j’en suis certaine.

… La présidence Obama est l’une des plus opaques et hypocrites que l’on n’ait jamais vues. Si elle a heureusement autorisé l’élimination de Ben Laden, il reste à déterminer la part électoraliste dans cette décision.

… Bush en réalité est victime de son succès car un attentat qui n’aboutit pas, cela fait trois lignes dans la presse. Bush a par ailleurs laissé à Obama un Irak stabilisé et qui n’a pas bougé lors du récent "Printemps arabe".

Comment jugez-vous la couverture médiatique en France de cette élimination historique ?

Les médias français ne veulent pas reconnaître qu’ils ont eu tort de s’emballer pour Obama qui n’est qu’un nouveau venu, qui n’a jamais rien fait dans sa vie pour mériter une adoration pareille. Les journalistes en France ne font aucun effort : c’est un mélange de paresse intellectuelle et de mauvaise volonté. En plus de leur parti pris virulent contre le Parti républicain, ils ont une profonde méconnaissance de ce qu’est devenu aujourd’hui le Parti démocrate, beaucoup plus à gauche qu’autrefois.

2011/05/24

"Ne cédons pas aux sirènes des ayatollahs qui souhaiteraient, à les écouter, un monde sans voiture"

Soixante-treize députés UMP ont écrit, lundi 23 mai, au premier ministre, François Fillon, pour lui faire part de "la profonde exaspération" exprimée par des "milliers" d'électeurs face aux nouvelles mesures de sécurité routière

peut-on lire dans un article dans Le Monde écrit avec l'AFP.

"A l'heure où les yeux du monde sont braqués sur l'ancien directeur général du FMI, les Français semblent de plus en plus agacés du comportement de leurs élites et notamment des politiques", déclarent-ils dans ce courrier à l'instigation du député des Bouches-du-Rhône Richard Mallié.

LES FRANÇAIS "AGACÉS DU COMPORTEMENT DE LEURS ÉLITES"

"En l'espace de quelques jours, les milliers de courriels que nous avons reçus pour condamner les décisions" du comité interministériel sur la sécurité routière du 11 mai "en sont la preuve flagrante". "Nous insistons sur le fait qu'il ne s'agit pas d'une simple 'mauvaise humeur' passagère mais bien d'une profonde exaspération", mettent en garde les signataires. …

Si l'augmentation depuis le début de l'année du nombre de morts sur la route est "dramatique", "ne cédons pas aux sirènes des ayatollahs qui souhaiteraient, à les écouter, un monde sans voiture", plaident-ils, en espérant que M. Fillon étudiera avec "bienveillance" ces "remarques".

"ABSENCE TOTALE DE CONCERTATION"

"Si nous partageons votre ambition quant au traitement attentif des problèmes de sécurité routière, nous regrettons l'absence totale de concertation qui a précédé ce comité interministériel. De plus, nous estimons que d'autres mesures sont plus urgentes à prendre afin d'améliorer la sécurité routière, mesures qui ne seraient d'ailleurs pas davantage populaires", ajoutent les soixante-treize députés.


2011/05/23

DSK's Arrest Is Akin to French Socialists' "September 11", One Leftist Leader Says


Refusing as usual to see any tragedy involving Americans (or capitalists) as …tragic, while magnifying every one of their own (alleged) misfortunes — as well as any adversity occurring anywhere, so long as it is allegedly the result of misdeeds committed by clueless Americans and/or by evil capitalists — one Frenchman, a leader of DSK's fellow socialists, calls Dominique Strausss-Kahn's arrest and downfall the equivalent of September 11, Patrick Roger reports in Le Monde.
Pour les députés socialistes, c'est comme si le ciel leur était tombé sur la tête. « C'est notre 11 septembre [2001] à nous », confie un responsable du groupe. Tous sont totalement abattus.
This follows a tradition in France and Europe — especially among commentators, intellectuals, and cartoonists — of trivializing 9-11 and making inappropriate references about 911

And in this case, the false analogy leads one Le Monde reader to react:
Le 11 septembre 2001 : 3 000 morts ce jour-là, et innombrablement plus par la suite (Afghanistan, Irak...). L'affaire Strauss-Kahn : une victime certainement, et peut-être deux, car quelle que soit l'issue du procès, la carrière politique du directeur général du FMI semble singulièrement compromise. En tout état de cause, zéro mort. Le responsable du groupe socialiste à l'Assemblée nationale qui a cru bon d'affirmer que l'affaire Strauss-Kahn, " c'est notre 11-Septembre à nous ", manque du sens des mots, du sens de la mesure et du sens de la pudeur, tout simplement.

Edouard Reichenbach
Antony (Hauts-de-Seine)

2011/05/22

Finkielkraut : J'ai essayé d'explorer ce concept de "modération" auquel la politique nous avait habitués à donner une définition très pauvre

"L'esprit du roman, c'est la sagesse de l'incertitude" : voilà le titre de l'entretien de Jean Birnbaum avec Alain Finkielkraut dans Le Monde.

Pour penser les désastres du XXe siècle, vous mobilisez à part égale des philosophes (Hannah Arendt ou Jan Patocka) et des écrivains (Thomas Mann ou Vassili Grossman). Quelle aura été la leçon spécifique de la littérature pour ceux qui tentent de penser le phénomène totalitaire ?

Pour moi, ce n'est pas Soljenitsyne qui a joué un rôle fondamental. Le prophète qu'il était devenu m'a longtemps dissimulé le romancier, et je n'ai découvert ce dernier que tout récemment, quand j'étais malade, en lisant Le Pavillon des cancéreux puis Le Premier Cercle, deux livres prodigieux. Mais dans les années 1960/70, l'écrivain majeur, ce fut Kundera. D'abord avec La Plaisanterie que j'ai lu en 1968, sans pouvoir à l'époque me dégager du gauchisme, mais prenant acte de la réalité communiste. Et puis je me souviens de cette préface à Miracle en Bohème, de Josef Skvorecky, où Kundera faisait une comparaison entre Mai 68 et le Printemps de Prague, entre l'explosion de lyrisme révolutionnaire, dans un cas, et la "révolte populaire des modérés", dans l'autre. Depuis lors, j'ai essayé d'explorer ce concept de "modération" auquel la politique nous avait habitués à donner une définition très pauvre : la modération, c'est le centrisme, le centrisme ce sont les compromis, voire les compromissions. Or la modération nous renvoie à tout autre chose, et là on retrouve la littérature, l'esprit du roman, c'est-à-dire la sagesse de l'incertitude, la distance à soi, l'ironie comme auto-ironie. Après Kundera, sur ce terrain-là, j'ai relu Camus. Le démocrate est modeste, il sait qu'il ne sait pas tout et qu'il a besoin des autres pour enrichir sa pensée, fût-ce en la réfutant. Tout d'un coup s'impose cette notion de modestie, de finitude, qui est essentielle parce que, dans la tentation totalitaire, il y a l'idée non seulement d'un savoir absolu, mais aussi d'une identification avec le Bien. Ici, un autre nom me vient pour compléter cette pléiade : Paul-Louis Landsberg. En 1937, ce philosophe aujourd'hui oublié définissait l'engagement comme la décision pour une cause imparfaite. Voilà : ne pas tirer prétexte de l'incertitude pour se désengager mais en même temps préserver, par la conscience de l'imperfection, la fidélité à la cause que l'on défend de tout fanatisme.

Vous avez beau affirmer que la littérature est gardienne de la nuance, quand vous intervenez dans le débat public, vous ne faites pas toujours dans la nuance... Comment expliquez-vous vos propres outrances, vos infidélités à l'égard de la littérature ?

L'indignation est une muse dangereuse, elle peut dicter des phrases simplistes et violentes. Je ne suis certes pas immunisé contre cette tentation. Voilà pourquoi je ne fais aucune confiance à ma spontanéité : je prépare chaque intervention radiophonique ou télévisée comme un grand oral et je demande à relire tous mes entretiens dans les journaux. C'est pour une interview non relue que j'ai été l'objet, en novembre 2005, d'un lynchage médiatique dont les effets se feront sentir longtemps encore. Mes idées ne me viennent pas immédiatement à l'idée : il me faut du temps, des tâtonnements et des ratures. Mais la nuance ne doit pas non plus devenir un slogan. Il peut arriver que la situation historique soit manichéenne. Il y a aussi des scandales. On ne peut pas vivre toujours sur le modèle du scandale et de l'affaire Dreyfus, mais enfin, l'affaire Dreyfus a existé !

"En France, depuis Villon, le salut pour les vauriens c'est la littérature, et une grande oeuvre rachète tous les crimes", écriviez-vous en 1980 dans Le Juif imaginaire (Seuil). Ces lignes permettent-elles d'éclairer ce qui demeure un mystère pour beaucoup de vos lecteurs, à savoir votre fidélité envers l'écrivain Renaud Camus ?

Je ne pense pas que l'ignominie puisse être rachetée par un beau style. Je n'ai aucune fidélité à l'égard de quelqu'un comme Brasillach. Pour moi, la littérature ce n'est pas le style, ou du moins le style importe-t-il d'abord comme dévoilement du monde. Renaud Camus n'a commis aucun crime et dans Du sens (POL, 2002), il a fait minutieusement justice des accusations proférées contre lui. Mais ses ennemis n'ont pas désarmé. Ils ne se sont pas même donné la peine de lire ce livre. Peu leur importe la vérité. Peu leur importe les oeuvres. Ce qu'ils veulent, c'est pouvoir se mobiliser encore et toujours contre la "Bête immonde". Je suis redevable, en autres choses, à Renaud Camus, de cette magnifique définition : "La littérature, c'est le reste des opérations comptables du réel." J'aimerais que ceux qui sont idéologiquement hostiles à Renaud Camus reconnaissent au moins sa valeur d'écrivain. Je vous le dis, si cela ne se fait pas, c'est parce qu'en France l'amour de la littérature s'est perdu.

2011/05/21

Un (premier) martyr dans la lutte contre la répression de plus en plus impitoyable contre les automobilistes ?!

Est-ce qu'on peut dire que la lutte contre "une répression de plus en plus impitoyable" contre les automobilistes aurait besoin de martyrs ? Ce serait tragique, mais si c'est le cas, Stanley Bargas pourrait être le premier d'entre eux…
…vers 13 heures, un motard a été grièvement blessé sur la route départementale 905 … le pilote du deux roues, qui circulait en direction d’Auxonne, aurait été déstabilisé lors d’une manœuvre de freinage à hauteur du radar fixe …
En effet, la lutte contre la vitesse, et le matraquage des conducteurs qui s'ensuit, ignore les accidents que causent les radars. Durant une réunion du groupe UMP de l'Assemblée nationale, plusieurs "élus se sont élevés pour se faire [le porte-parole des automobilistes] et fustiger les « mesures des technocrates parisiens » ainsi que l'« absence de concertation » qui avait présidé à leur adoption", explique Patrick Roger dans Le Monde.
« Vous ne savez plus quoi inventer », s'est plaint Yves Albarello, élu de Seine-et-Marne, pour qui les images télévisées des premiers panneaux démontés ont eu un effet « désastreux ». « Pendant tout le week-end je me suis fait insulter », a relaté l'élu de Seine-et-Marne.

…Chacune de ces interventions a été ponctuée par une salve d'applaudissements, pendant que M. Fillon, à la tribune, rongeait son frein sans dissimuler son exaspération.
Jeanne Bourdillon réalise une interview de Jean-Luc Nobleaux (auteur du livre Radars, le grand mensonge) pour le compte de Riposte Laïque. On se demande si on n'est pas forcé d'être d'accord avec l'un de leurs éditeurs quand celui-ci s'exprime ainsi (mettant en garde contre une prise du pouvoir possible du Front National — quand son leader, Marine Le Pen, semble être l'une des seules à défendre les automobilistes — si les autres partis ne commencent pas à prendre en compte la légitime exaspération vis-à-vis de la répression outrancière contre des citoyens honnêtes) :
Je suis héberlué que la férocité de cette agression que subissent les automobilistes – dont je suis – depuis sept ans ne soient condamnée que par de rares hommes politiques … et surtout totalement occultée par la gauche, alors que ce sont les classes populaires qui en sont les principales victimes.

[Dans un stage de rattrapage, Paul a] rencontré la réalité d’une France maltraitée, des commerciaux, des artisans, des livreurs, des entrepreneurs, des salariés, qui avaient besoin de leur voiture pour gagner leur vie. Ils racontaient les circonstances dans lesquelles ils avaient perdu 5, 6, 7, 8 ou 10 points, et leur angoisse de perdre leur travail. Un livreur, qui venait de se mettre à son compte, avait dû travailler toute la nuit, entre le premier jour et le deuxième, pour assurer le travail qu’il n’avait pu accomplir, pour cause de stage. [On peut assumer que ce monsieur a dû être très vigilant au volant le second jour — ni les jours qui ont suivi !] Je peux donc dire, sans exagérer, que je dois en être à pas loin de 1.000 euros qui ont quitté ma poche, pour enrichir l’Etat, sans que je n’ai, une seule fois, eu l’impression de mettre la vie d’autrui en danger.

Ce scandale n’a jamais ému les représentants de la gauche, dont on croyait que le travail consistait à protéger les classes populaires et le monde du travail. … Il est cocasse de constater la pugnacité de cette gauche à défendre son idole déchue, DSK, et son indifférence devant le sort de millions de Français, victimes de la politique répressive de Sarkozy et de ses radars. Preuve encore une fois, s’il le fallait, qu’ils ne sont que les deux faces d’un même miroir.

Quant à Jean-Luc Nobleaux, qui vient "d’une famille fortement ancrée à gauche", il se déclare être "le premier sidéré par cette incroyable désertion du terrain, de la part du PS notamment", et par le fait que (pour citer Jeanne Bourdillon) "depuis des années, la seule force politique qui paraisse défendre les automobilistes soit le Front national". L'auteur du livre Radars : le grand mensonge s'exprime ainsi :
Le verbalisé paie à tous les étages pour sauver ou récupérer son permis. Et c’est aussi un moyen pour le gouvernement de faire profiter les « acteurs de la route » du fantastique pactole généré par le mitraillage des radars. Auto-écoles, Prévention routière, Automobiles clubs, etc. tous s’engraissent grâce aux stages de récupérations de points, ce qui dissout en même temps une bonne partie de la contestation éventuelle.

…Cette sur-répression engendre une sur-délinquance : conduite sans permis, fausses plaques, trafic de points ou de papiers, délits de fuite, mais aussi insolences ou agressions envers les forces de l’ordre. Car le policier de base est désormais méprisé ; devenu auxiliaire fiscal, il est détourné de sa mission première, la protection du citoyen. La conséquence la plus grave de cette mobilisation des FDO sur le bord des routes (avec quotas de PV à remplir) est la flambée parallèle de l’insécurité, réelle celle-ci. Les policiers ne peuvent être partout, d’autant qu’on réduit leurs effectifs. Quant on aperçoit 4 pandores occupés à traquer les automobilistes à la jumelle à l’entrée de Corbeil-Essonnes, alors que ces mêmes pandores sont interdits de séjour par des petits caïds de 18 piges dans la fameuse cité des Tarterêts juste derrière, on ne peut qu’être estomaqué par la façon dont fonctionne notre République.

2011/05/20

Après l'affaire Enron, la justice américaine voulait montrer que nul n'est au-dessus des lois, quels que soient sa fortune ou son nom

Certaines associations ont protesté contre une pratique qui va à l'encontre de la présomption d'innocence, estimant contradictoire que l'accusé ait le droit de se taire (en vertu du 5e amendement) mais pas d'interdire que son image soit utilisée contre lui, avant même qu'il ait comparu devant un jury.
Pourtant, explique Corine Lesnes dans Le Monde, le traitement réservé à Dominique Strauss-Kahn est habituel dans les procès américains.
Mais les tribunaux ont autorisé les perp walk à condition qu'elles servent un but légitime : dissuader d'éventuels criminels ou éduquer sur le travail des forces de l'ordre.

…Après l'affaire Enron, la justice voulait montrer que nul n'est au-dessus des lois, quels que soient sa fortune ou son nom. Il arrive aussi que les procureurs proposent de surseoir au perp walk si le suspect accepte de coopérer. Le prévenu décide de se livrer et il arrive au palais de justice de son plein gré.
En outre, continue Corine Lesnes dans Le Monde, depuis l'affaire Polanski, les Américains se méfient de la justice française :

« Imaginez le cirque juridique, médiatique et diplomatique si Strauss-Kahn avait réussi à retourner en France, qui, comme on le sait depuis l'affaire Polanski refuse d'extrader ses ressortissants », écrit Richard Brody, éditeur au journal New Yorker. « Voilà un pays qui, après tout, a accueilli à bras ouverts Roman Polanski quand il s'est enfui après avoir plaidé coupable de viol de mineure en Californie », ajoute Philip Gourevitch, du même magazine.

La France est jugée complaisante pour ce qui est des scandales de moeurs. Et la justice - des non-lieux contre les hommes politiques à la remise en liberté du chanteur Bernard Cantat - n'inspire pas une confiance absolue. « On peut se demander si nous aurions même eu vent des accusations contre DSK si les faits s'étaient déroulés à Paris. Les pressions qui auraient été exercées sur une immigrée africaine et mère célibataire s'efforçant de joindre les deux bouts l'auraient convaincue qu'il était dans son intérêt de se taire », écrit Judah Grunstein sur le blog World Politics Review.

« Ce que les Américains nous disent c'est : vous les Français, vous êtes coulants avec les puissants, explique le juriste de Washington. En ce moment, ils nous donnent une leçon de justice. »

2011/05/19

Le Monde Magazine's Cover Article on Picasso Lauds the Painter's Communist Convictions and His Far Left Contacts

In his cover article on Pablo Picasso, Michel Guerrin manages to plunge us back into the 1950s love affair with communism, lauding the Communist painter to the heavens for his "generosity" with his "political gifts" for fellow communists, all the while conspicuously avoiding any mention (or study) of over half a century of history — for instance the 1990s opening of the Soviet archives and the disclosure of the Verona program, not to mention the tens of millions of citizens murdered under the likes of Stalin and Mao.

Thus we have the Rosenbergs as "martyrs of McCarthyism" while Michel Guerrin is in awe of Picasso's (communist) convictions and waxes poetic about his "political gifts" which form "another major chapter of the painter's generosity". Meanwhile, his support for a communist periodical is one "the most emotional aspects of his generosity" (the editor and the painter "go swimming together" and they "remain friends until Picasso's death"):
Les cadeaux politiques sont un autre gros chapitre de la générosité du peintre, qui est resté jusqu'à sa mort membre du Parti communiste. Il donne au Parti, à sa presse, au Mouvement pour la paix, dessine pour les époux Rosenberg, martyrs du maccartisme …

Le soutien de Picasso au journal communiste Le Patriote, à Nice, de 1957 à 1967, est un des aspects les plus émouvants de la générosité. … Il le fait par conviction communiste.

2011/05/18

"Le racket, ça suffit!" "Les Français en ont assez d'un système de sanction automatique, impersonnel voire sadique"

Une semaine après avoir appris que la répression culpabilisatrice des automobilistes s'empire , un article dans Le Monde faisant savoir que le gouvernement ne reculerait plus en matière de "sécurité routière" (sic) témoigne ainsi des réactions dans les rangs de la majorité :
Excédés, de nombreux députés UMP présents à la réunion de mercredi ont quitté la salle. "Les Français en ont assez d'un système de sanction automatique, impersonnel voire sadique", tempête Jacques Myard, député UMP des Yvelines, qui reste convaincu de pouvoir faire reculer le gouvernement. "Ça ne nous convient pas ! Nous n'en resterons pas là", a prévenu Alfred Trassy-Paillogues, député UMP de Seine-Maritime en promettant des "actions". "Le racket, ça suffit!", a lancé Bernard Depierre, député UMP de Côte-d'Or.

"On est foutus ! Vos mesures, c'est une catastrophe électorale. Avec ça, on a perdu les élections", a lâché Jean Auclair, député UMP de la Creuse, au cours de la réunion…

Sarkozy et les intellectuels : la rupture

Au cours de la campagne pour l'élection présidentielle de 2007, quelques-uns parmi les plus médiatiques des intellectuels dits "de gauche", ayant en commun la rupture avec le marxisme, l'attention aux dissidents de l'ancien bloc communiste, la dénonciation des totalitarismes, le désir d'une France active contre les dictatures et les massacres, se ralliaient plus ou moins explicitement à ce candidat de droite atypique.
Ainsi commence le papier de Marion Van Renterghem dans Le Monde sur le "petit groupe informel d'intellectuels de gauche qui, en 2007, avaient affiché ou laissé entendre leur sympathie politique pour le candidat [Nicolas] Sarkozy, [et qui] partage aujourd'hui un autre point commun : de diverses manières et à différents degrés, le président les a déçus."
Nicolas Sarkozy, contre toute attente, parlait soudain leur langage. Il promettait "la rupture" avec les vieilleries idéologiques comme avec une diplomatie française mâtinée d'antiaméricanisme, mécaniquement critique d'Israël, en empathie avec les régimes arabes, complaisante avec la Russie nationaliste, insouciante des droits de l'homme au nom de la Realpolitik. …

Le plus sarkozyste des intellos de gauche [André Glucksmann persifle qu'à l'époque de son premier soutien à Sarkozy, il passait "en procès devant le comité central des anciens de 68"] est aujourd'hui le premier à se rétracter. Dans son nouveau livre, La République, la pantoufle et les petits lapins (éd. Desclée de Brouwer, 150 p., 17,90 euros), André Glucksmann revendique l'athéisme en politique : liberté d'approuver, liberté de contester. "Voter n'est pas entrer en religion", avait-il prévenu dans sa tribune du Monde.

Il s'adresse dans son livre, sarcastique, aux "croyants" de gauche, tranquillisés par le culte de Mitterrand et leur appropriation du meilleur de l'Histoire : "Main basse sur l'affaire Dreyfus, le Front populaire, la Résistance, l'anticolonialisme, tant de prestiges monopolisés panthéonisent votre parti à l'abri de tout soupçon."

Il ironise sur la droite, sa "suffisance décontractée" de l'après-de-Gaulle, ses "humeurs intermittentes, européennes, antieuropéennes, nationales, libérales, étatistes, mondialistes" pour qui "les références historiques vont et viennent, réformistes ou révolutionnaires par ci, bonapartistes, légitimistes ou orléanistes par là." Vous avez la foi ? demande Glucksmann aux uns et aux autres. "Moi pas."

Ni repentance ni regrets, donc. Mais une déception. Nicolas Sarkozy, qu'il avait convaincu d'instituer un secrétariat d'Etat aux droits de l'homme, confié à Rama Yade, n'a pas tardé à le dissoudre après avoir reçu pompeusement le colonel Kadhafi à Paris. Le président qui, imaginait le philosophe, aurait pu épouser sa grande cause du moment (la Tchétchénie), a certes accordé "des centaines de visas aux Tchétchènes", mais n'a pas résisté au réalisme politique et à Vladimir Poutine.

En novembre 2009, le projet de vente de navires de guerre Mistral par la France à la Russie est, pour Glucksmann, un premier désenchantement : "Fournissant à Poutine les armes d'un débarquement rapide en Géorgie, en Crimée, voire dans les pays baltes, notre message est clair : allez-y !", lance-t-il au chef de l'Etat français et à son vieil ami et ministre des affaires étrangères, l'ancien médecin humanitaire Bernard Kouchner. Qu'est devenu, se demande-t-il, ce président si fermement opposé à "une Realpolitik qui brade nos principes d'humanité pour d'hypothétiques contrats" ?

… Le "sarkozysme de gauche" venait en effet de germer autour du Meilleur des mondes, une revue ainsi baptisée par Alain Finkielkraut en hommage à Aldous Huxley et à l'anti-utopisme. La revue, elle-même issue du Cercle de l'oratoire, le think tank de Michel Taubmann, naît au printemps 2006 chez Denoël. "Finky", qui n'aime pas les bandes, s'en éloigne vite. Les signataires se réclament des grands apostats comme l'écrivain hongrois Arthur Koestler, capable d'avoir rompu avec l'idéal stalinien de sa jeunesse.

La revue Meilleur des mondes est d'esprit orwellien (antitotalitaire) et néoconservateur : atlantiste, s'alarmant des manifestations mêlant l'extrême gauche et les militants islamistes, pointant le danger d'un "fascisme vert" et favorable, après les attentats du 11 septembre 2001, à l'intervention armée en Afghanistan. Sur la pertinence de la guerre en Irak (défendue par Glucksmann, Goupil, Bruckner, Kouchner ou Taguieff, contestée par Finkielkraut ou Olivier Rolin), les contributeurs sont divisés. Sur le candidat Sarkozy aussi.

"La revue a suscité tout de suite la haine, raconte Olivier Rubinstein, directeur des éditions Denoël. On nous a étiquetés néoréacs." Le deuxième numéro, à l'automne 2006, n'y est pas pour rien : l'entretien avec le socialiste Dominique Strauss-Kahn passe inaperçu mais celui avec le ministre de l'intérieur de l'époque, Nicolas Sarkozy, range définitivement Le Meilleur des mondes du côté des traîtres à la gauche.

Ils étaient revenus emballés de la place Beauvau. "Ce mec est formidable !", ont commenté en sortant les intervieweurs (Bruckner, Glucksmann, Michaël Prazan et Yasmina Reza). "Sarko avait admirablement réussi à dire tout ce qu'on voulait entendre", raconte Pascal Bruckner, le recul aidant.

Sur la situation au Proche-Orient, la crise avec l'Iran, le blocage de l'Europe, le candidat leur vend la politique internationale de leurs rêves, en rupture radicale avec la diplomatie chiraquienne. La Russie ? On peut signer des contrats et lui demander de s'expliquer sur la Tchétchénie. L'Amérique ? Une alliée. Israël ? Une démocratie et un pays francophone. L'Afrique ? Il faut en finir avec la vision postcoloniale de la France. Les droits de l'homme ? "La France doit porter des valeurs universelles, et les faire vivre", assurait le candidat.

Romain Goupil voyait venir d'un mauvais oeil le sarkozysme rampant de ses amis. …
L'antisarkozysme frénétique, en revanche, est de nature à susciter de la part de ces intellectuels un regain de solidarité pour le président de la République. "La violence grégaire de l'antisarkozysme me rendrait sarkozyste, dit Alain Finkielkraut, d'autant que dans le domaine de l'école ou de la sécurité, ce que la gauche propose est purement démagogique."

Pour Pierre-André Taguieff, "le discours haineux contre Sarkozy est devenu un genre littéraire dans le monde journalistique et militant. Je ne vois que deux exemples comparables : le discours anti-Blum, et le discours anti-Mendès France. Je ne réduis pas l'antisarkozysme à la judéophobie, mais il y a un fond d'antisémitisme dans cette violence contre lui."

"Sarkozy a rendu la gauche folle, renchérit Pascal Bruckner. Cette haine démesurée contre lui est la seule chose qui continue à me rendre indulgent. Il est devenu la poupée vaudou de la France. Il va nous manquer : qui va-t-on haïr ?"

2011/05/17

Selon Thierry Meyssan, la CIA en veut à sa vie ; mais il ne croit pas une seconde que l'Amérique vient de tuer Ben Laden

[En Syrie] ce n'est pas Bachar Al-Assad qui fait tirer sur la foule. [Thierry] Meyssan se demande si ces miliciens en voiture ne seraient pas plutôt des Américains . Il en est persuadé : la CIA en veut à sa vie. Mais ne croit pas une seconde que l'Amérique vient de tuer Ben Laden.
Voilà le genre de choses qu'on apprend sur Thierry Meyssan, grâce à la chronique de Caroline Fourest dans Le Monde, Ben Laden chez Elvis. Mais il y a plus — bien plus :
Grâce à son livre [L'Effroyable Imposture (Carnot), dont la couverture proclame : « Aucun avion ne s'est écrasé sur le Pentagone ! »], Thierry Meyssan a connu une carrière internationale fulgurante. L'homme ne sait plus où donner de la tête, entre les invitations de son ami Hugo Chavez, les réceptions dans les ambassades iraniennes, les contacts avec la Chine, ses voyages en Syrie et surtout son nouveau job : conseiller en communication du Hezbollah à Beyrouth.

Drôle de trajectoire tout de même. Dans les années 1990, le même homme défendait la laïcité et la liberté d'expression contre l'intégrisme. A l'époque, il militait au Parti radical de gauche, au sein d'associations gays et se revendiquait franc-maçon. La gauche laïque raffolait de ses "billets" sur l'extrême droite catholique, bien que souvent faux ou romancés. Le Réseau Voltaire, sa petite agence d'information, prenait la suite du Projet Ornicar, une association défendant la liberté sexuelle contre la censure et l'ordre moral.

Etonnante reconversion, déjà, puisque Meyssan avait milité dans sa jeunesse au Renouveau charismatique, un mouvement moraliste inspiré du pentecôtisme américain. A l'en croire, son mariage avait même été "annulé" par l'Eglise pour homosexualité. Désormais, le voilà aux côtés des gardiens de la Révolution islamique, qui pend les homosexuels. Qui peut encore le croire ?

Véritable Picasso du conspirationnisme, Meyssan n'a cessé de changer de style et de versions pour vendre ses complots en kit, selon ses inspirations et la tête du client. Longtemps, la marotte du Réseau Voltaire fut l'Opus Dei. Puis ce fut l'ère du grand « complot mitterrandien », qu'il voyait partout. Y compris derrière le DPS, le service d'ordre du Front national ! La preuve ? Son chef de l'époque, Bernard Courcelle, avait travaillé au musée d'Orsay... où travaillait également Anne Pingeot, la maîtresse cachée de Mitterrand. Mais c'est bien sûr !

Depuis, notre Sherlock Holmes a trouvé une « machine à fantasmes » qui se vend bien mieux, surtout à l'international : la CIA. D'après le Réseau Voltaire, c'est elle qui a orchestré le 11-Septembre, mais aussi la prise d'otages de Beslan (Ossétie du Nord). Elle encore qui manipule le « printemps arabe ». Les Arabes ne sont déjà pas capables de détourner des avions, alors penser une révolution...
Dans le même état d'esprit, la chronique suivante de Caroline Fourest dans Le Monde évoquerait les "dernières théories" de Jean-Marie Le Pen :
Ben Laden d'abord. "Je trouve que tout ça est très suspect, pour ne rien vous cacher." Le voilà lancé : "Je sais que les Américains ont l'habitude systématique de créer eux-mêmes les événements dont ils ont besoin pour déclencher leurs opérations. Ce n'est pas la première fois. Beaucoup de choses me paraissent suspectes." Mais encore ? "Dans ce domaine, je crois les Américains capables de tout. Par conséquent, je ne sais même pas si Ben Laden était vivant ou mort. Beaucoup de gens affirment qu'il était mort depuis longtemps."

Une théorie, effectivement relayée par le Réseau Voltaire, qui jadis disait n'importe quoi sur le Front national. Les grands esprits se rencontrent.

Et le 11-Septembre ? Le Pen en doute, vous vous en doutez... "Ecoutez, quand un troisième immeuble qui n'est pas touché par un avion s'effondre tout seul, je me dis qu'on a dû l'aider. Quand je vois des avions qui touchent un étage et que ça provoque l'effondrement de l'immeuble, ça me paraît bizarre aussi. Et il y a d'autres choses qui me paraissent bizarres..." Par exemple ? "Je tiens que Pearl Harbor est un coup monté." Sur quelles bases ? "Tout le monde le sait." Dans ce cas... Suit toute une hypothèse historique passionnante, mais sans la moindre preuve. Inutile, puisque les Américains sont "capables de tout"

Tout est à l'avenant. Rien n'est surprenant. Jean-Marie Le Pen a soutenu Saddam Hussein au moment de la guerre du Golfe, puis Ahmadinejad dans sa quête de l'arme atomique, mais il ne soutiendra pas les rebelles de Benghazi : "Tous islamistes."

2011/05/16

Bin Laden Depicted as "an Arab Clint Eastwood" and "a Muslim Robin Hood" Who Met His End at His "Fort Apache" Compound

Following Plantu's cartoon of Osama Bin Laden as the hapless victim of a brutal execution, you will be happy to learn that France's premier daily devotes 2/5 of an entire page in the daily to a conspiracy monger who calls the execution of Bin Laden "a perfect crime" (the title of Christian Salmon's column in Le Monde). (The rest of the page is devoted to an odd cartoon as well as to a piece by Adam Thirlwell praising Che Guevara's influence on the Arab Spring revolts…)

While his criticism of the White House's incompetence regarding the narrative of the Abbottabad operation has much to commend it, Christian Salmon suggests it is reminiscent of the odd "official version of the [2001] attack on the World Trade Center" (sigh), invokes the philosophy of Jean Baudrillard, and goes on to refer to Bin Laden as "an Arab Clint Eastwood" and "a Muslim Robin Hood" who "claims to be avenging the suffering of the Palestinian people". The founder of the Parlement international des Écrivains (International Parliament of Writers or IPW) then serves us the old canard of moral relativism that America's enemy and America itself are equally at fault.

Drawing his imagery from Hollywood films, and — explicitly — from Hollywood westerns, CNRS member Salmon claims the terrorism script was indeed written by teh Al Qaeda honcho but with the help of the United States. Bin Laden is a "solitary hero", we learn, one "who appears and disappears at will," "defying the world's superpower" in the process. "Geronimo" was finally bagged, it seems (didn't Salmon just put the White House's entire story in doubt?!), during the final attack on his "Fort Apache" compound in Abbottabad.

The Al Qaeda leader represents "the figure of the vigilante" who "draws on the stereotypes of the Hollywood western, a legend or a myth that Bin Laden could never have created without the help of the United States, who participated in the production, in the staging, and in the broadcasting of the legend."

(To their credit, a number of Le Monde readers mention mental masturbation and/or wonder what fishy stuff Salmon has been smoking…)
Depuis le 11-Septembre, Ben Laden incarne ce héros solitaire, qui apparaît et disparaît à sa guise, narguant la plus grande puissance mondiale, un Clint Eastwood arabe, un Robin des bois musulman qui prétend venger les souffrances du peuple palestinien. C'est la figure du justicier qui puise aux stéréotypes du western hollywoodien, une légende ou un mythe que Ben Laden n'aurait jamais pu créer sans l'aide des Etats-Unis, qui ont participé à la production, à la mise en scène et à la diffusion de cette légende ; de George W. Bush, lançant la traque de Ben Laden par un avis de recherche "mort ou vif" comme dans les westerns, jusqu'au choix malheureux du nom de code de l'opération, "Geronimo", pour désigner la charge finale contre le fort Apache de Ben Laden, le compound d'Abbottabad.

2011/05/15

FN : un Etat fort et interventionniste ainsi que le refus du libre-échange

Le programme du Front National est
un mélange de poujadisme, d'étatisme et de refus du libre-échange
apprend-t'on de la part de Abel Mestre dans Le Monde.
Apparaît ainsi un Etat fort et interventionniste qui peut "engager certaines dépenses publiques pour redresser le pouvoir d'achat".
Un jour plus tôt, Le Monde et l'AFP avaient résumé le programme de la dirigeante du FN ainsi :
"Capitalisme populaire" et suppression des stock-options, possible encadrement des prix alimentaires, baisse de la taxe pétrolière …

Encore une façon de dire que (mis à part la baisse de la taxe pétrolière ou d'un quelconque impôt quel qu'il soit) les membres — et l'idéologie — de l'extrême droite (française ou européenne) n'ont rien à voir avec les Tea Partiers ou les membres du Republican Party américain, voire tout simplement des habitants de l'Amérique profonde (qui eux prônent plutôt la devise Don't Tread on Me ou Laissez-moi (-nous) tranquille(s)) — surtout lorsqu'on se rend compte que parmi les économistes cités par Marine Le Pen s'en trouve un (Thomas Piketty) qui est "proche du PS".
Pour séduire les "classes moyennes déclassées " et les classes populaires qui ont le sentiment que les salaires ne progressent plus, elle préconise non seulement l'interdiction des stock-options, des parachutes dorés et des retraites chapeaux, mais aussi l'essor d'un "capitalisme populaire".
Mise à jour :
Jean-Marie Le Pen [a] appelé les jeunes à "se prendre en main", qu'ils "ne comptent pas sur l'aide de l'Etat ou des parents en s'inspirant de l'exemple de Jeanne". Il fait ainsi entendre un petite musique qui diffère du discours de Mme Le Pen, dans lequel le recours à l'Etat est souvent présenté comme une solution.

2011/05/12

Bernard Squarcini : "La France est la cible n° 2 d'Al-Qaida"

Dans une interview avec Yves Bordenave et Rémy Ourdan dans Le Monde, Bernard Squarcini (le chef de la direction centrale du renseignement intérieur ou la DCRI) confirme que "la France [est] la cible n° 2 d'Al-Qaida."

Ce qui a de quoi diluer quelque peu les déclarations auto-congratulatoires pendant les années Bush comme quoi les Français ne seraient pas inquiétés par des attentats islamistes (contrairement aux lignes aériennes américaines, prétendait-on, des compagnies comme Air France ne seraient jamais inquiétés), vu le refus de Jacques Chirac de se joindre à la guerre contre Saddam Hussein et vu la popularité de la France (et de la lucidité des Français) auprès des populations arabes et musulmanes qui s'ensuivrait inexorablement…
…la menace principale pour la France est Al-Qaida au Maghreb islamique [AQMI]. Il y a une proximité géographique, une histoire coloniale passée, et il y a ces allées et venues et ces liens familiaux entre des gens en France et d'autres dans les pays du Maghreb et du Sahel. Il y a aussi une progression qualitative d'AQMI, et la France est en tête des pays menacés.

Ça se confirme avec la tentative d'attentat contre notre ambassade à Nouakchott [Mauritanie] : 1,7 tonne d'explosifs. Manifestement, ils ont un peu la haine. Depuis qu'elle a fait allégeance à Al-Qaida, AQMI a décuplé ses activités. …

S'il n'y a pas d'éléments nouveaux [de nouvelles menaces spécifiques contre la France], pourquoi le ministre de l'intérieur, Claude Guéant, a-t-il déclaré que la France "craint des représailles" ?

Depuis un moment, les communiqués de Ben Laden, de Zawahiri et d'AQMI nous ciblent de plus en plus. On le prend en compte. Les Américains sont la cible n° 1 et la France la cible n° 2 d'Al-Qaida.

2011/05/11

Non seulement la répression culpabilisatrice continue, elle s'empire

Pour lutter contre "le comportement irresponsable de ceux qui s'autorisent à rouler à des vitesses très abusives", les avertisseurs de radar seront interdits et les panneaux indiquant la présence de radars fixes seront supprimés
indiquent AFP et Le Monde.
Les députés UMP réagissent :
"Le racket, ça suffit!" "Les Français en ont assez d'un système de sanction automatique, impersonnel voire sadique"

2011/05/05

FN et la gauche, même combat ? Un leader du Parti de gauche énervé qu'on dise que les gauchistes et les Le Pen sont sur le même terrain (anti-libéral)

Il y a toujours eu un socle d'ouvriers et d'employés qui votent à droite. … C'étaient des gens en opposition absolue aux communistes et aux socialistes. C'est cette base que Marine Le Pen a récupérée parce que Nicolas Sarkozy a ouvert les vannes entre la droite et l'extrême droite.
C'est ainsi que se prononce Jean-Luc Mélenchon. Et pourtant, dans leur interview avec le coprésident du Parti de gauche, Jean-François Achilli, Jean-Jérôme Bertolus et Françoise Fressoz ("Dimanche soir politique") lui demandent non pas si la "nouvelle offensive de Marine Le Pen" (en direction de l'électorat populaire) divise, ou risque de diviser, la droite, mais si cet état des faits n'est "pas inquiétant pour la gauche" (!). Et les questions dans ce sens énervent visiblement l'intéressé :
Mais quand elle dénonce violemment le libéralisme, elle vient sur votre terrain.

Qu'est-ce que vous voulez démontrer ? Nous allons passer toute l'émission à expliquer que je suis différent de Marine Le Pen ? Il ne faut pas se contenter de dénoncer l'ultralibéralisme comme le fait Marine Le Pen. Il faut aller à la source du partage des richesses. Ce n'est pas l'immigré le problème, c'est le banquier, le financier. La préférence nationale n'a aucun sens et ne correspond à rien d'organisable. Ce qu'il faut, c'est partager les richesses de gré ou de force. La bataille s'est toujours jouée entre la gauche ouvrière et syndicale, la gauche communiste et de combat et l'extrême droite. Sur le terrain, Il n'y a que nous pour mener cette bataille.

2011/05/04

Aux USA, avec sa politique économique, Marine Le Pen serait une politicienne de gauche ; elle confirme que "Obama (!) est loin à droite de nous"

[Marine Le Pen] has come out with a detailed critique of capitalism and a position promoting the state as the protector of ordinary people. “For a long time, the National Front upheld the idea that the state always does things more expensively and less well than the private sector,” she told me. “But I’m convinced that’s not true. The reason is the inevitable quest for profitability, which is inherent in the private sector. There are certain domains which are so vital to the well-being of citizens that they must at all costs be kept out of the private sector and the law of supply and demand.” The government, therefore, should be entrusted with health care, education, transportation, banking and energy.
Inside the New York Times Magazine, Russell Shorto has an in-depth portrait of France's (Kinder, Gentler) Extremist, whose economics are "frankly leftist" and whose "economic stance is drawing interest from the left as well as the right": "When I pointed out that in the U.S. she would sound like a left-wing politician, [Marine Le Pen] shot back, “Yes, but Obama is way to the right of us,” and opined that proper government oversight would have averted the American financial crisis." Mainstream parties across Europe "have not found answers to this pan-European movement," adds the director of the John Adams Institute in Amsterdam, "for which the term “far right” seems increasingly inadequate."

Read also (en français) :
"Le besoin d'Etat fort" : les mots de Le Pen prouvent que la (l'extrême-)droite française n'a rien à voir avec le Republican Party et les Tea Partiers
• Dans l'élection de 2012, L'es électeurs du FN sont pour Obama à 70%
Critique de la privatisation et de la politique ultralibérale : Marine Le Pen prouve que les conservateurs US n'ont rien à voir avec les thèses du FN
Le programme officiel du Front National : un Etat fort et interventionniste ainsi que le refus du libre-échange
FN et la gauche, même combat ? Un leader du Parti de gauche énervé qu'on dise que les gauchistes et les Le Pen sont sur le même terrain (anti-libéral)
L'objectif du FN : capter les peurs engendrées par la mondialisation et surfer sur l'insécurité et la souffrance sociales
Her father, Jean-Marie Le Pen, was a founder of the National Front in 1972 and served as its leader, and perennial presidential candidate, until his retirement in January, at 82. Along the way, thanks in part to his penchant for crisply expressed opinions — that the Nazi occupation of France was “not particularly inhuman,” that the gas chambers were “a detail,” that “the races are unequal,” that someone with AIDS is “a kind of leper,” that “Jews have conspired to rule the world” — he and his party became emblems of European right-wing extremism.

…Then in January, Marine — at 42, the youngest of his three daughters — won a battle to succeed her father as president of the party. Almost overnight, she brought the National Front not just back into the spotlight but also into outright competition. The polls that show her matching or outpacing [Nicolas Sarkozy] have shuffled the French political game board.

Marine Le Pen’s sudden prominence draws attention to the contrasts between her and the man she hopes to replace. Where Sarkozy is stylish, Le Pen tends toward simplicity. Where he has become, to many, a classic say-anything-to-please-anyone politician, Le Pen’s followers find her to be a straight-talker. Sarkozy is seen as representing the elitists who support the increasingly unpopular European Union, while Le Pen wraps herself in the mantle of the French republic. Even in derisive nicknames, she comes across as the stronger: Sarkozy is Monsieur Bling Bling; Le Pen has been called la peste blonde — a play on both la peste noire, the French term for the Black Death, and, more recently, la peste brune, which referred to the Nazi menace.

…This jump in support for so polarizing a figure raises a question that has ramifications not only in France but also in other places where the far right is resurgent: is Le Pen fille a different person from her father, or has racism simply become mainstream?

…The family has a closeness, and a dedication to an iconic ideal of the French state, that seems almost cultish. … Le Pen works assiduously at the fine political balancing act of remaining loyal to her father — and maintaining the support of the party’s base — while distancing herself from the elder Le Pen’s outrageousness. She has jettisoned her father’s frank anti-Semitism, but she keeps the anti-immigrant policy plank as a central feature of the platform and will occasionally use headline-grabbing rhetoric, as when in December she likened the French having to endure Muslims praying on their streets to living under Nazi occupation.
She insists that her message on immigration is not xenophobic but rather commonsensical. She pointed repeatedly to the United States as a model: “In France, we often say the U.S. is a multicultural society, but it’s not. It’s multiethnic but one single culture. I don’t say that nobody should enter our country. On the contrary, in the old days immigrants entered France and blended in. They adopted the French language and traditions. Whereas now entire communities set themselves up within France, governed by their own codes and traditions.”
…Sarkozy’s recent and highly visible use of the French military has given Le Pen another opening to exploit. She is opposed to his involvements in Libya and Ivory Coast and to globalist enterprises in general; she sees the uprisings in the Middle East to be partly a result of “policies put into place by the International Monetary Fund and the World Trade Organization toward an impoverishment of the North African countries.” Sarkozy’s aligning France with NATO might win support in the White House and 10 Downing Street, but it has done little for his popularity at home. For the country’s disaffected, it only reinforces views of him as an elitist and a globalist. Where in the United States many of the disaffected might look to a return to Christian and free-market values, their counterparts in Europe find comfort in a turn toward nationalism, which includes state protection, and away from the institutions of globalization. Le Pen is locked into that mind-set.

2011/05/03

D'éminents journalistes semblent découvrir avec stupéfaction et/ou indignation que quelques trublions ont le droit de s'exprimer

Je ne voudrais pas être discourtoise mais cette affaire de « nouveaux réacs » commence à sentir le poisson. Daniel Lindenberg avait déjà levé ce lièvre en 2002, dans un petit livre judicieusement intitulé Le Rappel à l'ordre (Seuil). Dix ans plus tard, de nouveaux « nouveaux réacs » sont donc appelés à comparaître devant le tribunal médiatique.
C'est au tour d'Elisabeth Lévy de réagir, voire de s'insurger, dans Le Monde devant le chapeau qu'essaient de leur faire porter, à elle et à d'autres penseurs politiquement incorrects, les tenants de la pensée unique, dont le moindre ne serait pas le quotidien de référence lui-même.
Qu'on se rassure, personne n'exige — en tout cas ouvertement — que l'on fasse taire « cette demi-douzaine de polémistes » qui, selon Le Monde, « cumulent chacun deux, trois, quatre collaborations rémunérées dans les médias les plus importants et une multitude d'invitations gracieuses dans les talk-shows », pendant que leurs valeureux adversaires résistent bénévolement dans des caves.

Il est vrai que ces esprits chagrins ne songent qu'à entretenir leur fonds de commerce. C'est ainsi, le bon journaliste a une pensée, le « nouveau réac » une posture. En tout cas, entre régimes amaigrissants et pouvoir des francs-macs, leur puissance médiatique est devenue un « marronnier » de saison.

Cette querelle picrocholine révèle une curieuse conception du pluralisme. D'éminents journalistes semblent découvrir avec stupéfaction et/ou indignation que quelques trublions qui ont le front de ne pas penser comme eux ont le droit de s'exprimer.

…Après tout, on a bien le droit de préférer le débat entre gens du même avis. Il est cependant paradoxal de célébrer la diversité en toute chose sauf dans le domaine des idées.

L'épouvantail « néo-réac » ressort des tiroirs au moment où ceux qui savent ce qui est bon pour le peuple réalisent, paniqués, que, malgré vingt ans de prêchi-prêcha, ce peuple ingrat, notamment sa composante la plus populaire, s'obstine à voter pour un parti désigné comme antirépublicain — mais accepté, on se demande pourquoi, dans le jeu républicain. L'ennui, c'est que le peuple est bon, d'où la nécessité de s'en prendre aux mauvais génies qui, en flattant ses plus bas instincts, l'ont encouragé sur cette pente déplorable.

Au-delà du vote FN, la « droitisation » de la société française inquiète nos grandes consciences, comme s'il était par nature bien d'être de gauche et mal d'être de droite. C'est précisément cette transformation inconsciente d'opinions, légitimes du reste, en dogmes incontestables, qui interdit toute discussion sur des sujets méritant mieux que des condamnations sommaires.

…Notre société qui adore « la transgression » passe son temps à traquer les « dérapages », terme indiquant clairement que certains points de vue sont autorisés et d'autre pas.

2011/05/02

Que veut-on ? Une idéologie dominante, avec un credo à réciter sous peine de bûcher médiatique ?

Fauché par la mort à l'âge de 47 ans, [Albert Camus] a passé un temps considérable à répondre à la haine répandue par les journaux qui se déchaînaient contre ses livres, coupables de dire la vérité en un temps où l'on préférait le mensonge avec Sartre que la vérité avec lui
rappelle Michel Onfray en évoquant le philosophe (sur lequel il écrit un livre) qui s'interrogeait, entre autres, «sur la fascination des intellectuels opposés à la peine de mort mais qui la défendent tout de même pourvu qu'elle soit infligée au nom de la prétendue bonne cause du progrès marxiste — il en reste aujourd'hui une poignée tout au culte de "l'idée communiste"...» Michel Onfray (philoshope lui aussi) entend ainsi se joindre à ceux qui, tels Yvan Rioufol ou Elisabeth Lévy, répondent aux bien-pensants, aux "humanistes", aux élites, et à tous les autres membres de leurs réseaux — dont le journal Le Monde — qui essaient de "[pulvériser] celui qui ne dit pas comme eux".
A plus d'un demi-siècle de distance, Camus pense un monde qui semble être encore le nôtre ! Il se révèle également juste dans ses analyses, quand il diagnostique que la polémique a remplacé le dialogue : "Le XXe siècle est, chez nous, le siècle de la polémique et de l'insulte." Qu'est-ce que la polémique ? "Elle consiste à considérer l'adversaire en ennemi, à le simplifier par conséquent et à refuser de le voir. Celui que j'insulte, je ne connais plus la couleur de son regard. Grâce à la polémique, nous ne vivons plus dans un monde d'hommes, mais dans un monde de silhouettes."

On ne cherche plus à persuader, on intimide ; on ne veut pas dialoguer, on terrorise ; on ne souhaite plus échanger, on lance l'anathème, on recouvre sous des flots de haine et d'insultes, de mépris et de calomnies. Dans cette perspective, Camus propose une "morale du dialogue" et en appelle à Socrate — auquel il associe Montaigne et Nietzsche.

Quel intellectuel ne souscrit pas aujourd'hui à cette scie prêtée à Voltaire : "Je ne suis pas d'accord avec vous, mais je me battrai toute ma vie pour que vous puissiez vous exprimer", avant d'envoyer un formidable coup de gourdin sur la tête de celui qui ne pense pas comme lui puis d'activer les réseaux d'amis qui, dans les médias, pulvérisent celui qui ne dit pas comme eux ? Les journalistes, si souvent coupables d'inceste intellectuel, prennent ces temps-ci la plume pour dénoncer une poignée de journalistes (Zemmour en navire amiral, Robert Ménard en destroyer, Elisabeth Lévy en corvette, plus quelques autres petits bâtiments de guerre...), tous coupables d'attentats à la pensée correcte. On ne résoudra pas le problème en transformant ses adversaires en ennemis, en les stigmatisant comme pétainistes, néofascistes, crypto-vichystes, sous-marins de Le Pen et autres noms d'oiseaux qui dispensent de débattre.

Que veut-on ? Une idéologie dominante, avec un credo à réciter sous peine de bûcher médiatique ? Mais qui décide alors du catéchisme ? Ceux qui affûtent la guillotine... Je crains qu'en France le sartrisme domine encore comme une imprégnation éthologique dès qu'il s'agit du débat d'idées !

En 1955, Simone de Beauvoir écrivait dans un article intitulé "La pensée de droite aujourd'hui", repris dans Privilèges : "La vérité est une, l'erreur multiple. Ce n'est pas un hasard si la droite professe le pluralisme"... Camus, le philosophe, qui, dans Actuelles II, opposait "la gauche policière" à la "gauche libre" avait alors répondu : "Si la vérité devait être de droite, alors je serais de droite."

Arrêtons donc la haine, le mépris, l'insulte, l'anathème, la guillotine, les autodafés, les bûchers qui, pour l'instant, ne sont que de papier. Si d'aventure le débat véritable prenait la place de la polémique, nul doute que reculerait un peu le spectre des échafauds concrets.

Rioufol évoque le comportement absurde du discours unique qui souligne le désarroi des idéologues confrontés à l'effondrement de leurs utopies

Tout ce qui est répété [en politique] est contredit au quotidien. Or cela n'empêche pas les esprits automatiques de s'arrimer aux dénis du réel en jugeant relaps les contradicteurs. Ce comportement absurde souligne le désarroi des idéologues confrontés à l'effondrement de leurs utopies. Trente ans de pilonnage n'ont cessé de contourner les faits et de prendre les gens pour des imbéciles. Aujourd'hui, cela se voit…
C'est ainsi que Yvan Rioufol répond aux bien-pensants, aux "humanistes", aux élites, et à tous les autres — dont le journal Le Monde — pour qui "la méthode Coué appliquée à la politique et à l'information ne consiste pas seulement à n'admettre qu'un discours unique", elle "oblige à ne voir que ce qui est autorisé par la doctrine."
Les journaux «progressistes», acteurs du bourrage de crâne, en sont à dresser la liste de ceux (Éric Zemmour, Élisabeth Lévy, Robert Ménard, Éric Brunet, votre serviteur) qu'ils accusent d'accaparer la parole au prétexte qu'ils n'observent pas les codes de la pensée labellisée. Parce que ces cinq-là semblent trouver l'écoute d'une opinion rebelle qui a investi Internet, ils irritent la caste dépossédée de son monopole. Les épinglés seraient réactionnaires, ultraconservateurs, extrémistes. Voire néofascistes ou postnazis, puisque leurs discours se rapprocheraient de ceux des années 1930, comme le récitent des historiens du dimanche: procès authentiquement staliniens, ceux-là.

Cette poignée d'accusés révèle en fait l'intransigeance d'un journalisme militant rejetant le choc des idées. Ce que disent les hérétiques devrait passer inaperçu: ils défendent la liberté d'expression, la laïcité, le modèle républicain. Y voir les signes d'une pensée rétrograde et totalitaire est un non-sens effrayant. Si la démocratie est menacée, c'est par ceux qui en contestent les règles, à commencer par la tolérance.

… La comédie des bons sentiments touche à sa fin. À moins de se ridiculiser davantage, le monde politique ne peut plus recourir aux faux-semblants humanistes utilisés pour méconnaître le réel. …

2011/04/21

Qu'est un droitiste dont les prévisions s'avèrent fausses ? Un infâme menteur ; Un gauchiste? "peu importe", il était "en mal d'inspiration"

Même les grandes plumes sont parfois en mal d'inspiration
écrit Corine Lesnes dans Le Monde. Avant de décrire avec le plus grand des joies, pendant quatre colonnes (sur cinq), le voyage de John Steinbeck avec son chien — "un caniche d'un âge respectable, francophone de naissance ("à Bercy"), et toujours d'un maintien parfait" — à travers les USA, une aventure "plein de ces personnages rocailleux qui font l'Amérique éternelle — Tea Party avant l'heure, pourrait-on dire." Ce n'est que dans les trois ou quatre derniers paragraphes que l'on apprend que la raison pour laquelle le récit de ce voyage (de 1962) est à l'heure aujourd'hui :
Cinquante ans plus tard, le journaliste Bill Steigerwald a refait les étapes du voyage. Sans chien, mais avec la prétention journalistique de mesurer le changement. Il ne s'attendait pas à ce qu'il a trouvé : affabulations, exagérations, approximations... Recoupements faits, il apparaît que Steinbeck a enjolivé quand il n'a pas tout simplement bidonné comme un vulgaire journaliste en mal de scoops.

Dans le magazine Reason d'avril, Steigerwald a publié un récit accablant. En 75 nuits, l'écrivain en a passé tout au plus une quinzaine seul dans sa roulotte. La plupart du temps, il a dormi dans des motels, parfois luxueux. Elaine, sa femme, a passé 45 jours avec lui (à San Francisco, ils ont même mis Charley au chenil !). Certains des personnages hauts en couleur n'étaient pas là où il dit les avoir croisés. [Pis, Corine Lesnes: Plusieurs personnages hauts en couleur semblent avoir été inventés de toutes pieces.]

La découverte a suscité quelque émotion dans les milieux universitaires spécialisés, pris en défaut d'esprit critique. … D'autres ont dit : peu importe. L'écrivain a tous les droits.

Trois-quatre paragraphes qui annullent toutes les raisons pour avoir pris quatre colonnes pour (re-)raconter les (non-)périples de John Steinbeck et de Charley.

De toute apparence, quand un conservateur — fût-il artiste, politicien (George W Bush), ou autre — est pris en défaut (à tort ou à raison), et que ses prévisions, raisonnables, s'avèrent être fausses, il n'est rien de moins qu'un fieffé menteur qui est coupable de tous les maux et qui doit être fustigé, sans relâche, avec toutes les armes possibles. Quand un gauchiste est pris en défaut — et que ses récits de ce qu'il (n')a (pas) fait s'avèrent être un véritable mensonge (aucun autre terme ne fournit une meilleure description) — c'est (toujours) un grand homme (une grande plume) "en mal d'inspiration" qui fait partie de ces êtres qui ont "tous les droits."