DSK aura été privé de sa liberté 6 jours. 6 jours de trop évidemment.
Ce sont 7 années de privation qui ont été réservées à l'ouvrier agricole anonyme, traité avec une triste banalité comme un violeur ordinaire, dans une affaire ordinaire, dans une France ordinaire. …
Au delà des drames individuels, que reste-t-il de ces affaires croisées?
Une justice américaine aussi prompte à accuser avec une violence folle qu'à reconnaitre ses erreurs, avant qu'il ne soit trop tard. Une justice française, tel un paquebot lancé sur son erre, poussif au démarrage et que des années seules peuvent conduire à se remettre en question.
Suis-je le seul à regretter bien plus amèrement la violence cachée d'une justice française apparemment si prudente que la clairvoyance incisive d'une justice américaine en apparence brutale et impatiente ? Comment ne pas voir que notre système judiciaire a bien du mal à avouer qu'il s'est trompé en raison d'un orgueil institutionnel tellement incompatible avec toute l'humilité qui doit présider au jugement des accusés ? …
Mieux vaut une justice qui se trompe fort mais peu de temps
Le problème est bien là : la loi française et notre culture judiciaire orientent toute la procédure pénale vers la "manifestation de la vérité". Cela est infiniment prétentieux. Nous devrions savoir que la vérité n'est que de deux ordres: intérieure ou spirituelle. Entre les deux, c'est-à-dire dans l'espace humain que nous appelons société, il est impossible de prétendre à la Vérité. L'oubli, la honte d'avouer une faute même légère, l'appât du gain, les liens personnels entretenus avec la victime supposée ou l'accusé, la malveillance ou encore la soumission à l'autorité sont autant de racines pour des témoignages erronés ou faux.
Que nous disent les affaires croisées de Loic Secher et de Dominique Strauss-Kahn : qu'il vaut mieux une justice qui se trompe fort mais peu de temps, à une justice qui se trompe doucement et patiemment. …
La vérité est une utopie et sa recherche acharnée conduit à accorder trop d'importance à l'émotion que suscite légitimement une personne qui se dit victime. Il n'y a en effet rien de plus sacré qu'une victime dans la société française post-guerrière et, puisque rien ne différencie en apparence une victime autoproclamée d'une véritable victime, l'une comme l'autre bénéficieront du même crédit de sympathie, du législateur avec ses "lois compassionnelles" au juge en passant par notre Président de la République qui cherche à protéger celles-ci toujours un peu plus.