2024/11/05

Se pourrait-il que le Collège électoral américain, vilipendié à souhait, soit la meilleure forme de gouvernement ?


Pour mieux comprendre le collège électoral américain (The Electoral College), il faut comparer avec l'Europe.

Cela correspond au fait que pour conquérir le pouvoir en France, il ne faut pas remporter un vote populaire direct dans toute la France pour devenir président, il faut obtenir le vote populaire direct dans plus de la moitié de chacun des 101 départements du pays. Ce n'est peut-être pas une mauvaise idée.

Pourquoi? C'est ici que la dernière croisade hystérique de la gauche a commencé il y a 6 ou 7 ans, à savoir pour abaisser la limite de lenteur (désolé, la limite de vitesse) dans toute l'Europe.

En 2018, le Premier ministre d'Emmanuel Macron n'avait rien trouvé de mieux que de réduire la limite de vitesse sur les routes de campagne de 90 à 80 km/h. Cela a pu être fait parce que les villes n'ont pas protesté vu que les citadins n'avaient pas de voiture, grâce aux transports publics, ou n'en avaient pas souvent besoin. Et qu’en est-il des agriculteurs qui, eux, ont vraiment besoin de véhicules ? 

En démocratie directe, c'est une minorité qui est négligée. Parce que la démocratie (même si le pays s'appelle la République Française, c'est-à-dire non pas la Démocratie française) ne donne aucun pouvoir aux agriculteurs, ils n'avaient pas le choix, ils ont dû recourir à la rébellion, ce qui a déclenché les premières attaques contre les radars omniprésents dans le pays et plus tard, le mouvement des Gilets Jaunes. « Laissez-moi/nous tranquilles » était leur message, correspondant au slogan des colonies américaines adressé au roi d'Angleterre en 1776 : « Don't tread on me ».

Si, au lieu de remporter un vote populaire direct dans toute la France pour devenir président, le vainqueur devait obtenir un vote populaire direct dans plus de la moitié de chacun des 101 départements du pays – y compris tous ceux sans grandes villes qui vivent principalement de l'agriculture – Edouard Philippe aurait-il jamais osé proposer une telle législation?

Mais les "États"-Unis d’Amérique ne sont pas tout à fait un pays comme la France, le Danemark ou le Japon, c’est plutôt une fédération (50 États) comme l’Union européenne (27 nations – bien que contrairement à l’Europe, les États-Unis parlent la même langue).

Imaginez que l'UE veuille se démocratiser encore davantage : si l'UE devait avoir un vote populaire direct, alors des pays comme le Portugal, l'Estonie et le Danemark protesteraient (non sans raison) que ce serait injuste, car alors les petits pays (c'est-à-dire les pays les moins peuplés) perdraient toute sorte de pouvoir ; ils proposeraient plutôt un système basé sur un vote par État membre. Ici, les grands États comme l’Allemagne, la France et l’Italie répondraient (non sans raison) que ce serait injuste (et absurde) que des pays qui ne comptent pas plus de dix millions d’habitants aient autant de pouvoir que des pays qui en comptent plus de 60 millions. Pour que le renforcement de l'unification de l'UE puisse se poursuivre, un compromis doit être trouvé.

Aux États-Unis, ce compromis de 1787 entre les petits États (Delaware, Connecticut, Caroline du Sud...) et les grands États (Pennsylvanie, Virginie, Massachusetts...) consistait en un Sénat où chaque État disposait du même nombre de des sénateurs et une Chambre des représentants où le nombre de membres est basé sur la population de chaque État, tandis que l'élection présidentielle est déterminée par le collège électoral qui combine les deux.

En 1848, Abraham Lincoln en personne expliquait comment le système était né et comment fonctionnait le gouvernement :

La Convention constitutionnelle [à Philadelphie en 1787], qui a élaboré la Constitution, a rencontré cette difficulté : les petits États voulaient structurer le gouvernement de manière à ce qu'ils puissent être égaux aux grands, indépendamment de l'inégalité de la population ; les grands insistaient sur l’égalité en termes de population. Ils ont établi et fondé la Chambre des représentants sur la population, et le Sénat sur les États, quelle que soit leur population ; et le pouvoir exécutif sur les deux principes, par des électeurs dans chaque État, en nombre égal au nombre de sénateurs et de représentants de l'État réunis.

Tout comme les Américains ne veulent pas se laisser dicter par la Californie, l'État de New York et l'Illinois (ou plutôt Los Angeles, New York, Chicago et d'autres grandes villes des États-Unis), les Européens ne voudraient pas se laisser dicter par l'Allemagne, la France. et l'Italie non plus.

Les démocrates n’ont cessé de crier au cours des huit dernières années qu’Hillary Clinton a remporté le vote populaire en 2016. Ce qui n’est pas dit, c’est que les votes qui l’ont amenée à devancer son adversaire se sont tous déroulés dans un seul État, la Californie. Retirez « le Golden State » du jeu et Donald Trump a remporté le vote populaire dans les 49 autres États réunis. Bien sûr, on pourrait alors répondre : Mais écoutez, la Californie fait partie des États-Unis, après tout. Oui, et le rôle du collège électoral est d’empêcher un seul État de déterminer le résultat d’une élection.

Il n’y a pas une élection présidentielle tous les quatre ans ; il y en a 51 (un dans chaque État – ce qui rend plus difficile pour un parti de commettre une fraude – plus le District de Columbia). Sur 50 États, Donald Trump a remporté le vote populaire direct dans 30 États, soit cinq (5) plus que la moitié. C'est pourquoi il a gagné les élections et les électeurs ont donc décidé — non sans raison ; au contraire — de l'installer à la Maison Blance. Quand les gens crient qu'Hillary était la vraie gagnante, Mark Cunningham du New York Post répond que

Hillary Clinton a « gagné » une élection que l’Amérique n’a pas eue. Aucune des deux parties ne s’est concentrée sur une victoire du vote populaire national parce que toutes deux connaissaient les règles. Et si les règles avaient été différentes, toute la campagne aurait été différente aussi.

Comme l'écrit The Tennessee Star dans sa Constitution Series (ces 25 épisodes devraient être lus par tous les Français qui s'intéressent à la Constitution américaine), principalement The Electoral College and the Selection of the President,

Si les pères fondateurs avaient choisi le vote populaire direct comme moyen de choisir un président, le peuple californien aurait dicté aux 49 autres États qui serait président.

Cela donne à Michael Barone l’occasion d’écrire dans le Washington Examiner : Abandonner le Collège électoral permettrait à la Californie d’imposer un régime impérial à une Amérique coloniale.

Par conséquent, ajoute Robert Curry, du American Thinker, 

Les rédacteurs de la Constitution avaient l’intention de préserver vos droits inaliénables ainsi que les miens en empêchant la concentration du pouvoir politique au sein du gouvernement central.

Alors que John Merline, de l'Investor's Business Daily, souligne qu'aux États-Unis 

les élections présidentielles n’ont jamais été conçues pour être des concours de popularité. Il était prévu de donner à chaque État une voix pour décider qui devrait les diriger tous.

Enfin, David Harsanyi de Reason Magazine : 

Ainsi, toutes les parties de la nation ont une certaine forme d’influence sur le prochain dirigeant, tout en empêchant de grandes parties de ladite nation d’être victimes d’intimidation.

Pour cette raison, les États-Unis ne sont pas une démocratie mais une république. Harry Jaffa fournit l'explication :

La différence entre une démocratie et une république est que la première est le gouvernement de la majorité, tandis que la seconde est le gouvernement de la majorité combiné à la défense des droits des minorités.