Interviewé par Alain Salles et Yves-Michel Riols, le nouveau premier ministre estonien, Taavi Roivas a, comme le ministre polonais des affaires étrangères, "exprimé son inquiétude au sujet de la livraison des navires de guerre Mistral par la France à la Russie". (Pendant ce temps, on est en droit de se demander si de nombreux lecteurs du Monde peuvent afficher de la fierté en ce qui concerne leur défence de la Russie couplée de mépris pour les pays baltes ainsi que pour l'Europe de l'est.)
… la France doit-elle renoncer à la livraison des deux navires de guerre Mistral à la Russie ?
La livraison de ces navires aurait clairement un impact négatif sur la sécurité de la région. C'est inquiétant pour nous, je mentirais si je disais le contraire. Je ne suis pas convaincu qu'il serait opportun de livrer des armes sophistiquées et de très haute technologie à la Russie en ce moment.
En avez-vous parlé avec le président Hollande ?
Je lui ai dit que cela est préoccupant pour nous, car ces navires renforceraient les moyens militaires de la Russie. Certes, ce contrat n'a pas été conclu au cours des derniers mois, nous essayons de comprendre la position française. Je tiens cependant à rappeler que la France a beaucoup contribué à notre sécurité régionale en participant à des missions de surveillance aérienne de l'OTAN au-dessus des pays baltes et nous lui en sommes reconnaissants. Je sais aussi que la France continue à être attachée à la défense collective des pays membres de l'OTAN.
Avez-vous l'impression que Moscou instrumentalise les minorités russes dans les pays baltes pour déstabiliser la région ?
Il n'y a pas de motifs pour que cela puisse se faire. Je pense que les Russes vivant en Estonie [un quart de la population est russophone] sont satisfaits de leur sort, ils n'ont pas envie d'être « sauvés » par qui que ce soit ! Ils savent que le niveau de vie en Estonie est supérieur à celui en Russie, qu'il s'agisse des salaires, des retraites ou de la protection sociale. Je ne pense pas qu'ils aient envie d'échanger leurs euros contre des roubles. D'autres aspects influencent aussi leur attitude, comme le fait de vivre dans un pays de l'UE, où il existe une totale liberté.
Rappelons qu'il y a deux pétitions contre la vente des Mistrals à Moscou :