C'est l'histoire d'Oradour-sur-Glane, page tragique de la seconde guerre mondialeexpliquent Georges Châtain et Benoît Hopquin.
10 juin 1944 : le régiment Der Führer de la Panzerdivision Waffen SS Das Reich investit ce bourg de Haute-Vienne et massacre 642 personnes, dont 221 femmes et 215 enfants de moins de 14 ans. Parmi la poignée de rescapés, Robert Hébras, fusillé dans une grange, sauvé par miracle du coup de grâce puis de l'incendie allumé par les bourreaux. Sa mère et ses deux soeurs sont mortes, brûlées dans l'église. C'était alors un jeune homme de 18 ans, un être agile, ce qui lui sauva la vie.
Il a aujourd'hui 87 ans. Droit comme un i, il guide toujours des visites dans le labyrinthe des ruines, jusqu'aux murs de la grange où les hommes ont été fusillés, "pour le souvenir mais surtout pour le présent". Robert Hébras a été récemment décoré en Allemagne et en Autriche pour "son implication passionnée dans le travail de réconciliation".
Georges Châtain et Benoît Hopquin rappellent aussi que
le massacre du 10 juin est la pire, mais pas la seule, des tueries perpétrées par la division Das Reich dans sa traversée de la région. La veille, le 9 juin, elle a pendu 99 otages aux balcons de Tulle (Corrèze) et envoyé en déportation 149 hommes dont 101 ne reviendront pas. Elle a fusillé 67 civils à Argenton-sur-Creuse (Indre).
… Georges-René Boos, le seul Alsacien volontaire, condamné à mort à Bordeaux, peine commuée en prison à vie, sera à son tour élargi en 1958 et disparaîtra dans la nature.
… c'est la France entière qui est perturbée. Dans Le Monde du 20 février 1953, Hubert Beuve-Méry signe l'éditorial "Une victoire de Hitler". "Fallait-il jeter un manteau de silence, sinon d'oubli, sur l'odieux massacre... L'honneur n'avait et n'a rien à faire dans ce débat, sinon par le jeu combiné de raisonnements mal conduits et de sentiments exaspérés..."
Est-il possible de se poser deux questions — tout en évoquant les critiques habituelles de la société américaine, par les Européens naturellement plus doués que les Ricains sur ces questions (sur toute question) ?
• Est-ce qu'on peut admettre que les habitants d'Oradour-sur-Glane auraient bien aimé avoir eu des armes à feu le 10 juin 1944, et qu'il aurait été bon pour eux de pouvoir "vendre chèrement leurs peaux" — voire mettre en fuite les membres du SS (qui ne pouvaient savoir combien de citoyens étaient armés, s'ils étaient en face de gens bien entraînés, et qui même en cas de victoire finale de l'armée allemande, ne souhaitaient pas être tués, même avec une balle d'un vieux fusil de la dernière guerre) ?
• Est-ce qu'on peut admettre que la seule chose que méritaient bon nombre de ces SS, c'était la peine de mort ? et que la commution de cette sentence à la prison à vie — une perpétuité invariablement promise par les opposants de la peine de mort comme réelle et incompressible —, même dans un cas aussi extrême que celle-ci (un massacre de 642 âmes!), a presque aussitôt été réduite à une peine risible (5 ans en prison) ?