l y a maintenant plus de six ans, nous étions micros et caméras à la main, poussés par un beau rêveraconte Jean Lesieur dans Le Monde.
En français, en anglais, en arabe, nous allions raconter la France au monde, le monde à la France, le monde au monde. Nous allions créer une entreprise d'information en phase avec le « soft power » de notre pays, « nation universelle », porteuse, donc, d'une voix universaliste.Dans ce qui n'était encore qu'un chantier, nous avons bâti ce qui constitue le rêve France 24, ce grand élan impulsé par François Mitterrand, concrétisé par Jacques Chirac, confirmé par Nicolas Sarkozy. Nous avons réuni une exceptionnelle équipe de journalistes venus d'horizons et de pays différents qui incarnaient la modernité de la France mondialisée.
Dans les semaines précédant notre lancement, la presse anglaise se gaussait de la grenouille française qui voulait se faire aussi grosse que le « beef » anglo-saxon, ou faire concurrence aux riches émirs du Golfe. « La voix de la France », disait-on avec morgue, serait celle du Quai d'Orsay ou de l'Elysée. France 24 resterait à jamais lilliputienne à côté de la BBC, de CNN, d'Al-Jazira. Mauvais pronostic !
[Et pourtant, des] questions sérieuses se posent, sur des modes de management, des alliances et des retournements bizarres, voire suspects, des investissements sur des personnages toujours à l'affût d'un statut, de pouvoir, d'influence, d'argent. Là où elle s'était créée dans la fièvre et l'enthousiasme des « start-up », France 24 finit par incarner ce qu'il y a de pire dans le « service public à la française » : peureuse et paralysée comme un mammouth en fin de vie.
Des questions sur la vision éditoriale que doit incarner France 24 se posent aussi. Sur l'universalisme, qui est son ADN, sa raison d'exister dans le monde d'aujourd'hui. Ou la chronique traditionnellement plan-plan de la « Françarabie » et de la « Françafrique ». Naturellement, se pose enfin la question des moyens et de la structure du véhicule. Fusionner ou pas, avec RFI ou d'autres ?
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