Cette victoire contre l'obscurantisme n'est pas le «succès de la communauté internationale», comme l'ont assuré sans complexe notre gouvernement et l'Union européenne. Elle appartient à George W. Bush et à Tony Blair. Si la France pacifiste et onusienne avait été suivie, Saddam Hussein coucherait encore dans son lit et gazerait ici et là ses opposantsécrit Ivan Rioufol dans son bloc-notes.
En Irak, la constatation : 60 à 75% des électeurs inscrits — le chiffre précis sera connu la semaine prochaine — ont élu dimanche leurs députés, en bravant les menaces d'attentats de la «résistance». Le peuple a dit non à al-Qaida, qui se revendique comme «ennemi de la démocratie». Il a dit non aux intégristes et à leur volonté d'imposer la charia. La leçon donnée à l'Europe «antiguerre» — et singulièrement à l'Espagne, qui quitta l'Irak après l'attentat de Madrid du 11 mars 2004 dû aux islamistes — est celle d'un courage hors du commun.
Une fois de plus, l'antiaméricanisme des faiseurs d'opinion aura obscurci leurs propres jugements et égaré les Français. A l'automne, les experts en certitudes donnaient George W. Bush pour déshonoré et vaincu : il allait être confortablement réélu le 3 novembre. Les mêmes assuraient que les Irakiens refuseraient de s'ouvrir à un processus démocratique initié par les Etats-Unis et imposé par la force des armes : ils se sont à nouveau trompés en beauté. Cela fait beaucoup.
Il est d'usage, dans la presse française, de s'effarer du militantisme néoconservateur de la télévision américaine Fox News, effectivement critiquable. Mais c'est ce même esprit propagandiste, anti-Bush cette fois, qui habite la majorité des commentateurs. La pensée unique ne peut admettre que le président des Etats-Unis puisse marquer des points dans sa stratégie de sécurisation du Moyen-Orient. C'est pourtant ce qui se passe, même si rien n'est évidemment réglé.
Cette victoire contre l'obscurantisme n'est pas le «succès de la communauté internationale», comme l'ont assuré sans complexe notre gouvernement et l'Union européenne. Elle appartient à George W. Bush et à Tony Blair. Si la France pacifiste et onusienne avait été suivie, Saddam Hussein coucherait encore dans son lit et gazerait ici et là ses opposants. Le pari de la modernisation du monde musulman — particulièrement mal argumenté par ces armes de destructions massives inexistantes — est une perspective atteignable.
Même si les Américains n'ont pas su se faire accepter des Irakiens, ces derniers ont clairement désigné le totalitarisme islamiste comme étant leur véritable ennemi. Dès lundi, le terroriste al-Zarqaoui a d'ailleurs promis de continuer «la guerre sainte», «jusqu'à ce que la bannière de l'islam flotte au-dessus de l'Irak». Le choc des civilisations, claironné par les guetteurs, n'a pas fait se lever le peuple contre «l'occupant», comme le bêlaient les moutons. L'affrontement oppose une idéologie de soumission au désir d'émancipation des masses.
Néanmoins, nombreux vont être les prophètes à se bousculer pour annoncer le pire, tel ce chercheur au CNRS, Pierre-Jean Luizard, qui prédit «la guerre civile, inter communautaire et contre les Américains». Ils construisent leurs scénarios sur la poursuite et l'aggravation de l'insurrection — celle des égorgeurs et des bombes humaines — qui arriverait à opposer Kurdes, sunnites et chiites entre eux. Pourtant, après avoir vu ces hommes et ces femmes risquer leur vie pour aller voter en aspirant à la paix, on a du mal à prendre encore leurs augures au sérieux.
Contagion démocratique ?
Une des idées de Bush amuse beaucoup les belles âmes parisiennes et leurs poissons pilotes : celle d'une «contagion démocratique» au Moyen-Orient. Pour ces éminences méprisantes, non seulement un pays musulman ne peut produire que du pire, mais elles considèrent du plus haut comique d'imaginer qu'un Irak, délivré de son tyran, puisse ouvrir un appétit de liberté chez ses voisins. Et si, là aussi, nos donneurs de leçons se mettaient le doigt dans l'oeil ?
Se garder d'un optimisme béat. Mais un parallèle s'impose entre la dynamique démocratique enclenchée en Irak et celle apparue dans les Territoires palestiniens avec l'élection, le mois dernier, de Mahmoud Abbas à la succession de Yasser Arafat. Comme les Irakiens, les Palestiniens ont refusé de suivre les appels au boycott du scrutin, lancés par les mouvements intégristes. Lundi, le nouveau président de l'Autorité palestinienne a reconnu qu'il existait «une chance historique pour instaurer la paix» avec Israël.
Si l'on ajoute à ce tableau les élections qui ont eu lieu en Afghanistan après la chute des talibans, s'esquisse ce qui ressemble à une prise de conscience libératrice, dans un monde arabo-musulman vivant sous la férule des mollahs depuis des siècles. La «contagion» est certes encore timide en Syrie, et l'Iran théocratique reste inquiétant dans ses oeuvres nucléaires. Mais ce serait s'enferrer que de continuer à considérer cette région du monde rétive à toute forme de démocratie électorale.
Pour avoir soutenu Arafat et tenté d'épargner Saddam, la France des droits de l'homme est apparue comme l'alliée de deux despotes qui auront été des obstacles à l'épanouissement de leur peuple. Elle ne peut prolonger cette ambiguïté munichoise, aggravée par la décision de l'Union européenne de lever, cette semaine, ses sanctions diplomatiques contre le régime liberticide cubain. La France saura-t-elle saisir la main que lui tendent aujourd'hui les Etats-Unis ? Sa place est avec les démocraties. …
Le PC et sa mémoire
Le PCF serait-il exempté du «devoir de mémoire» concernant sa propre histoire ? Vendredi dernier, prenant prétexte du 60e anniversaire de la découverte d'Auschwitz, la présidente du groupe communiste au Sénat, Nicole Borvo, a appelé les collectivités à débaptiser «les rues et édifices publics portant le nom de personnes ayant soutenu les thèses des régimes vichystes et nazi». L'élue visait plus particulièrement Compiègne et sa rue Alexis-Carrel, Prix Nobel et théoricien de l'eu génisme ayant officié sous Vichy. Mais on aimerait entendre le PCF dénoncer ceux qui auront soutenu le pacte entre Staline et Hitler de 1940, ainsi que les dizaines de millions de morts des goulags, ces autres camps de concentration oubliés. Qu'attend Mme Borvo pour demander, par exemple, que Tulle (Corrèze) débaptise sa place Maréchal-Staline ?
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