Tandis que
Le Figaro, comme à son accoutumée, multiplie les mises en garde et les remarques condescendantes quant à toute nouvelle positive impliquant l'Oncle Sam (
l'élection démocratique en Iraq, pour prendre un exemple du jour) et en insistant que les bien-pensants français et européens sont, comme à l'accoutumée, la solution de toute bourde imaginée par les Yankees "ignorants du monde et aveuglés par leur puissance" (Charles Lambroschini termine son
éditorial par "Il faut donc que la France et les autres alliés aident l'Amérique à s'arracher du bourbier irakien" !!!),
l'ambassadeur de Grande-Bretagne en France écrit ceci :
Ce qu'il faut voir, dans les élections irakiennes, ce n'est pas les difficultés qui les entourent, mais tout simplement le fait qu'elles aient lieu ; et que la plupart des Irakiens d'aujourd'hui, qui n'ont jamais pris part à un scrutin démocratique, aient l'intention de se rendre aux urnes.
Les élections ne sont pas chose courante au Moyen-Orient. Les élections palestiniennes, qui ont porté au pouvoir Abou Mazen, ont pourtant envoyé un message fort de la volonté des Palestiniens de se tourner vers la démocratie et la paix. … L'Irak peut à son tour envoyer un nouveau message d'espoir, faisant écho à celui qu'a envoyé l'élection présidentielle en Afghanistan, qui s'est pourtant tenue dans des conditions tout sauf idéales.
Les actes de violence et d'intimidation perpétrés actuellement montrent bien que les factions opposées à la démocratie en Irak feront tout ce qui est en leur pouvoir pour saboter le scrutin du 30 janvier. L'un des leaders de la prétendue insurrection a déjà bien fait savoir que ce que lui-même et ses acolytes trouvent à redire à cette élection n'est pas tant les circonstances dans lesquelles elles se dérouleraient que le principe même de la démocratie.
Il faut bien voir la volonté qui anime ces adversaires de la démocratie de saper l'élection et l'ensemble du processus démocratique en cours dans les semaines à venir. L'intimidation est sans appel : "Si vous votez, vous vous ferez tuer." Il faut cependant bien voir aussi le désir qui anime la vaste majorité des Irakiens … de voter et de prendre en main leur destin. Leur détermination à participer au processus électoral et à l'organisation du scrutin, en dépit des menaces, est admirable.
Plus de 8 000 candidats sont en lice, soit plus de deux fois le nombre de candidats ayant brigué un siège à la dernière élection générale au Royaume-Uni ; 11 000 autres candidats se présentent aux élections locales, ainsi qu'aux élections régionales de la province kurde. Un tiers sont des femmes. 5 300 bureaux de vote ont été mis en place, et les campagnes d'information destinées aux électeurs touchent à leur fin. Près de 200 000 Irakiens participeront à l'organisation du scrutin sous la supervision des Nations unies. Le rôle de la coalition se bornera à assurer la sécurité là où il y aura lieu.
Dans la majeure partie du pays, on s'attend à un taux de participation honorable et à des conditions de vote plutôt régulières. Le calme règne dans 14 des 18 provinces du pays. Les choses seront donc effectivement plus difficiles dans certaines régions. Le problème majeur est de savoir dans quelle mesure toutes les communautés irakiennes y participeront. La décision de certaines factions sunnites de se désister n'arrange pas la situation.
Il reste cependant sur les listes de nombreux candidats sunnites prêts à braver la menace, à commencer par le président Ghazi Al-Yaouar, dont on connaît le succès de la visite à Paris ce mois-ci. Les sondages montrent en outre que de nombreux sunnites voudraient prendre part au vote malgré les menaces et les mesures d'intimidation épouvantables dont ils font l'objet.
En tout état de cause, le gouvernement qui sortira des urnes devra prendre en compte les vues et les aspirations de tous les Irakiens, notamment quand il s'agira d'élaborer et d'adopter la Constitution définitive de l'Irak. Le processus politique engagé et la tenue d'élections libres sont le meilleur garde-fou contre les divisions sectaires ou ethniques qui risqueraient de mettre en péril la souveraineté et l'intégrité du territoire, auxquelles nous sommes tous attachés.
Je passe beaucoup de temps à expliquer en France la position de la Grande-Bretagne sur l'Irak, et mes interlocuteurs ne sont pas avares de conseils quant à la manière dont il faudrait procéder. Nous tombons tous d'accord, en revanche, sur le fait que c'est aux Irakiens de prendre leur pays en main. Les élections du 30 janvier sont une étape dans ce sens. Le gouvernement irakien, avec le soutien de l'ensemble de la communauté internationale, a engagé un processus politique qui conduira dans les mois à venir non seulement à l'élaboration de la nouvelle Constitution, mais aussi à la tenue de nouvelles élections d'ici à la fin de l'année. Nous avons tous un rôle à jouer pour aider les Irakiens sur cette voie, qu'il s'agisse de sécuriser leur environnement, de faire monter en puissance le rôle des Nations unies, d'entraîner leurs forces de police et leurs forces armées, ou de leur offrir notre soutien financier et technique. Nous avons tous gros à y gagner.
C'est dans cette perspective que le Royaume-Uni s'est engagé à maintenir ses forces déployées en Irak, aux côtés de celles de la trentaine de pays qui participent à la coalition internationale. Nous avons cependant bien précisé que c'était aux Irakiens de décider, et que nous ne resterions pas si notre présence n'était plus souhaitée.
Nous nous attachons à former les forces de sécurité irakiennes dans les plus brefs délais pour leur permettre de prendre la haute main sur la sécurité intérieure et extérieure du pays. Il est indispensable, d'ici là, que les graves défis auxquels nous sommes confrontés n'entament pas la volonté de la communauté internationale de reconstruire l'Irak, comme les Irakiens eux-mêmes y sont bien décidés.
Par ailleurs, nous avons déjà eu le plaisir d'entendre la voix de
Sir John Holmes par le passé…